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Big'n
Knife Of Sin – LP
Computer Students records 2018


Big'n sort de sa retraite. Pour la deuxième fois. Après un retour en 2011 avec trois concerts incendiaires en France et le 10'' Spare The Horses, un bref passage en 2013 pour quatre nouvelles dates, le groupe de Chicago revient avec une tournée en Europe dans les tuyaux pour le printemps 2019 et six nouveaux titres, Knife Of Sin. Alléluia.
Le couteau du péché, c'est d'abord devoir prendre un ustensile coupant pour ouvrir ce magnifique emballage. Un sac en aluminium du plus bel effet conçu par l'ex Africantape Julien Fernandez qui se prend pour un étudiant en informatique. Computer Students a sorti le grand jeu. Il fallait bien ça pour que le contenant soit à la hauteur du contenu.
Le couteau du péché, c'est surtout de céder à la gourmandise de jubiler à un noise-rock qui a plus de vingt-cinq ans d'âge et faire comme si c'était hier, comme si de rien n'était. Big'n fait du Big'n et c'est meilleur que jamais, rappelant les plus belles heures de Cutthroat en 93. Et qui d'autre que Steve Albini pour mettre en boite ce disque ? C'est d'un classicisme à faire peur mais il faut bien avouer que pour enregistrer ce noise-rock chirurgical et historique, le joueur de poker a plus d'un atout dans son jeu et il sait toujours parfaitement comment s'y prendre le bougre. Comme une seconde peau.
Une peau qui colle aussi aux basques de ces solides gaillards de l'Illinois. Les années passent et rien n'y fait. Big'n se saigne, s'écorche, s'agrippe et fait brûler l'acier froid. L'aluminium de la guitare vous transperce, égrène des arpèges étincelants comme le regard d'un tueur. C'est violent et contenu en même temps. Ça s'installe sur un faux rythme et ça éclate à la gueule sans prévenir. Un groove pervers et entraînant, l'art de casser les reins, d'infliger une lente douleur, d'appliquer un riff qui coupe net en deux et cautérise dans le même mouvement avec un grain et une chaleur incomparable, le contrôle du larsen avant la piqûre mortelle. Et ne comptez pas sur la voix de William Akins pour s'alléger avec le temps. C'est le vernis final, le raclement de fond de gorge érigé en complainte au vitriol, le sourire carnassier du type sur la pochette intérieure sur le fond rouge sang. Il faut attendre le dernier titre (Sunk) pour l'entendre s'amadouer à l'instar de tout le morceau qui tord ton petit cœur, tour à tour beau, grave, hostile et surtout incroyable et qui se termine par un sample de gazouillis d'enfants pour rassurer et rappeler que ces gars là sont de bons pères de famille, des mecs normaux et que Big'n n'est qu'un groupe fait en dilettante. Si c'est pas malheureux.
Pleurez à jamais vos disques de Jesus Lizard. Foutez au feu à vos satanés albums de ces pauvres Shellac. Big'n, le dernier des Mohicans à détenir le flambeau du noise-rock dont il garde la flamme vivace et intacte.

SKX (12/12/2018)