protomartyr
domino


Protomartyr
Relatives In Descent – LP
Domino records 2017

Nul besoin de comprendre les paroles du chanteur Joe Casey pour s'apercevoir que les temps sont durs. Les disques de Protomartyr n'ont jamais été à la gaudriole mais le quatrième album Relatives In Descent transpire un pessimisme grandissant et de vilaines trompettes annonçant des désastres. Un album post-élection américaine qui a modifié la donne. Les paroles qui font couler de l'encre chez les chroniqueurs sonnent comme des désillusions poétiques observant un monde brûlant. Mais l'espoir persiste. Dans l'obscurité, la fleur s'agrippe, elle fleurit la nuit (Night-Blooming Cereus).
Musicalement, cela donne un Relatives In Descent moins direct et évident que son prédécesseur The Agent Intellect mais avec de la lumière qui pointe par en-dessous. Moins de tubes, de mélodies qui accrochent facilement le ciboulot et font tourner les rotules. La noirceur et la complexité du climat ambiant déteignent sur la musique de Protomartyr. A l'instar de A Private Understanding qui a servi de single annonciateur, les compositions sont plus introspectives, sombres et à tiroir mais au final, l'impact de Relatives In Descent s'étale sur la durée et est plus profond. Parallèlement, la musique gagne en clarté et en précision. Protomartyr passe maître dans l'art de l'écriture et signe un disque plus varié et réfléchi. Le guitariste Greg Ahee possède un don pour mélanger riffs et arpèges brillants et dynamiques, trancher dans le vif ou flirter avec la mélodie en finesse. La section rythmique de Scott Davidson (basse) et Alex Leonard (batterie) s'impose avec force, souplesse, exigence et un groove qui fait date avec notamment une basse souvent irrésistible comme sur Corpses In Regalia. Le post-punk, qualificatif dont on les affuble régulièrement, Protomartyr lui donne un sacré coup de jeune, l'explose régulièrement, l'entourloupe et Joe Casey reprend sans trembler le flambeau de Mark E. Smith, la mauvaise haleine en moins.
Les douze titres de Relatives In Descent font peu à peu leur chemin, diversifient les approches, les atmosphères, pénètrent les résistances à une ou deux baisses de régime près, donnent envie de danser, de pleurer, d'enrager, de s'enfuir. Avec pour terminer, un titre qui file un putain de frisson, les cinq minutes du très touchant Half Sister avec ses mystérieuses paroles, She’s just trying to reach you, refrain qui ouvrait également l'album sur A Private Understanding. La boucle est bouclée. Protomartyr s'affranchit toujours plus de ses influences et signe en pleine force de l'âge une bande-son idéale pour des jours meilleurs.

SKX (29/11/2017)