buzzooko
retrovox




Buzzøøko
Giza – LP
Retrovox 2017

L'Italie a toujours été un très bon pourvoyeur de groupes noise-rock s'inspirant de la scène de Chicago, Jesus Lizard en tête, forcément. A partir de là, le monde se partage en deux. D'un coté, ceux qui ne cherchent pas à s'éloigner de l'original et qui finissent par s'oublier assez vite une fois l'excitation du moment retombée. De l'autre, ceux qui se creusent un tantinet les méninges et tentent de proposer leurs propres partitions.
Pour notre plus grand plaisir, Buzzøøko appartient à la seconde catégorie. Il est même fortement permis de dire que leur spectre d'influences est beaucoup plus large. Et ce n'est pas simplement parce que Buzzøøko glisse de la trompette et du trombone sur Gettin' Sick. Les structures des morceaux ont une forte tendance à s'étirer et ça, dès le titre d'ouverture, Jerry The Joker, qui est aussi le plus long de Giza du haut de ces sept minutes, comme pour nous avertir que ce disque de noise-rock ne va pas correspondre à la norme.
Le trio originaire de Mantova n'est pas dans le combat permanent, dans les joutes rythmiques qui font saigner les jointures et un niveau élevé de distorsions pour faire pleurer les tympans. Buzzøøko alterne ou plus exactement, fusionne en un seul morceau une approche angulaire et des moments plus apaisés, un sens aigu de l'agression se prolongeant dans des passages instrumentaux mélodiques à l'instar de Jerry The Joker. Du White Tornado, groupe italien mythique, se cache dans les minutes les plus virulentes et pointues de Giza avec notamment ce chant toujours légèrement saturé. La tension affleure ou est à vif. Buzzøøko répète les mesures, évolue sous contrôle, explose, revient dans le droit chemin sans que les frontières soient bien définies. Buzzøøko suit une trame qui n'est pas cousu de fil blanc tout en restant lisible. La guitare acérée privilégie les accents mélodiques, la basse peut sortir de ses gonds, offrir des lignes mémorables (Hollow Man) et sous ces airs sérieux et concernés, le trio s'autorise de l'humour potache avec le titre Love Is Indie Hair.
Un noise-rock aux multiples saveurs, sinueux, frontal, viscéral, diluant sa rage dans des élans maîtrisés, des répétitions hypnotiques, une dureté qui sait arrondir les angles. Buzzøøko frappe fort et juste pour son premier disque tout en se disant que le meilleur reste à venir.

SKX (14/06/2017)