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sacredbones



Pop. 1280
Paradise – LP
Sacred Bones 2016

Un vent mauvais souffle sur Paradise. Humour caustique. L'idée du paradis selon Pop. 1280, c'est l'avènement de nos sociétés surveillées (et ça ne fait que commencer), le monde merveilleux sous contrôle d'internet et ses réseaux sociaux, votre téléphone portable suivi à distance et autres énigmatiques algorithmes qui ne sont là bien sûr que pour votre bien. Vous le voyez le bon gros radar sur la pochette ?
Les ondes dégagées par le groupe de Brooklyn sont plus noires que jamais. Pop. 1280 met de plus en plus la guitare à l'arrière plan au profit des synthés (et n'en profiter pas pour bêtement taxer Pop. 1280 de groupe synth-punk dès qu'un groupe pointe des putains de synthés !), se drape d'un noir profond, cogne plus durement et singulièrement et ça leur va à merveille. Pop. 1280 redéfinit ses propres règles et remet la machine en route après un mitigé précédent album.
La batterie martèle, se fait tribale et ne s'embarrasse pas de finesse. En mode Cop Shoot Cop, avec l'aide d'une boite à rythmes (Phantom Freighter) et de synthés plus percussifs que mélodieux. Ça casse en deux. Martial et implacable. Par là-dessus, Pop. 1280 balance ces couches nauséeuses et agressives sur lesquelles dansent des corbeaux macabres, réminiscences de relents industriels et de batcaves acides perdues en pleine mégalopole et remontés comme des punks.
Pop. 1280 est en période glaciaire, c'est plus ordonné que d'habitude mais c'est pour être mieux cassant mon enfant, plus effrayant, pénétrant les psychoses les plus aiguës. Se permet même le luxe de deux morceaux ambient, sans rythme, grouillant d'effets bizarres et de samples. Paradise, où c'est vraiment pas la fête et le bruit de la pluie qui tombe sur le bien nommé Rain Song, expérimentations et assemblages flippants pour un nouveau champ d'investigation prenant.
C'est tout de même quand le rythme s’abat et que Chris Bug expurge ses peurs que Pop. 1280 frappe les esprits. Les sept minutes de In Silico dans une homérique bataille de profonds éclats de claviers et de rythmes percussifs lancés dans une course poursuite suicidaire. Ou les deux morceaux les plus virulents et chaotiques, c'est à dire ceux où la guitare se fait le plus entendre (Chromidia et Kingdome Come). Pop. 1280 sait aussi se faire plus rampant et mélodique avec le très beau titre introductif Pyramids On Mars et ces sonorités de piano ou The Last Undertaker et son gimmick perçant de guitare. Sans oublier Chromidia et USS ISS, preuve ultime qu'un groupe avec des machines bien utilisées peut sonner organique et encore plus violent et malsain que n'importe quels groupes avec guitares. Dingue.
Pop. 1280 a enfin réalisé l'album résumant la somme de toutes leurs influences pour naviguer dans leur paradis à eux, personnel et passionnant.

SKX (16/03/2016)