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King
Champion Sounds To Awake In That Heaven Of Freedom 2xLPs Excelsior 2016 King Champion
Sounds porte plus que jamais parfaitement son nom. Le roi des sons tous
azimuts. Le champion de la diversité. Deux vinyles, dix-sept titres
étalés sur quatre faces gavées jusqu'à la
glotte, deux morceaux supplémentaires sur le CD glissé à
l'intérieur de la pochette gatefold, 87 minutes de musique, des
invités d'horizons très divers débarquant de partout,
une instrumentation très riche, n'en jetez plus, To Awake In That
Heaven Of Freedom est complet. La fanfare cosmopolite à majorité
hollandaise est généreuse, s'en donne à cur
joie et monte encore d'un bon cran dans l'effort après le premier
album Different
Drummer et le 10'' Songs
For The Golden Hour. Ajay Saggar, multi-instrumentiste est à
la baguette comme toujours pour la composition alors que G.W. Sok négocie
les paroles quand il ne les emprunte pas à Vasko Atanasoski, Buddy
Holly ou C.B. Vaandrager. Forcément, avec une telle débauche
de musique, difficile de tutoyer les anges à chaque instant. Quelques
longueurs, quelques morceaux plus secondaires, des passages où
la tension se relâche. King Champion Sounds a été
ambitieux, bravo à eux. Le propos aurait toutefois mérité
de se resserrer. Ce qui signifie aussi, contrepartie positive, que vous
avez de quoi largement trouver votre lot de bonheur pour un album difficile
à appréhender en entier d'un coup d'un seul. Vous aurez
toujours un son nouveau à découvrir, une sensation inédite,
un frisson inconnu qui vous transperce alors que l'album a déjà
tourné une dizaine de fois. La palette musicale visitée
par King Champion Sounds est donc très large tout en maintenant
un fil conducteur qui pourrait s'appeler l'enivrement, le tumulte général
des sens, une sorte de psychédélisme latent et continue,
peu importe les chemins empruntés. De la frénésie
rock qui se met peu à peu en place sur les sept minutes introductives
de Mice Rats Roaches avec J. Mascis (Dinosaur Jr) à la guitare
aux turpitudes free-jazz de Baarsiderius 1 et 2 avec le saxophoniste et
clarinettiste Ab Baars, c'est tout un monde qui s'ouvre à vous,
de grands écarts stylistiques mais l'impression de toujours retomber
sur ses pattes. Même quand le propos se fait calme et grave sur
Smallest Tribe In The World. J'ai d'abord cru que Eugene Robinson s'était
encore échappé d'Oxbow pour poser son bel et noir organe
vocal. Que nenni, c'est Mike Watt, le légendaire bassiste de Minutemen,
qui narre un texte à l'aura poétique. Un des superbes moments
de ce disque. To Awake In That Heaven Of Freedom, c'est aussi du dub,
une basse charmeuse avec ses lignes entêtantes, des collages sonores,
des boucles de rythmes, des paysages sonores abstraits et étranges,
des envolées de cuivres, de l'électronique à visage
humain, le tout fondu en un seul titre ou pris séparément.
G.W. Sok laisse à plusieurs reprises le micro à d'autres
voix comme Johannes van de Weert, Remko Schouten, Max Bruins ou Mick Derrick
qui n'est pas le fils de l'inspecteur mais un ancien Prolapse. Les mélodies
sont tour à tour embrouillées ou limpides. La fête
tourne à la mélancolie avant de revenir à des desseins
généralement entraînants ou tendus. Un air de carnaval
à la De Kift survole Spy Soup. That *#$! Bus Again est un passage
obligatoire et culminant d'un album en comportant plusieurs et qui peut
vous emmener très haut. To Awake In That Heaven Of Freedom n'est
pas franchement le genre de disque que vous rencontrez à chaque
coin de rue. Il n'est pas aisé d'en faire le tour, le fourmillement
d'idées et de notes peut donner le tournis mais le voyage vaut
largement le déplacement. Les King Champion d'une nouvelle espèce.
Unique. |