guerillatoss
dfa
|
Guerilla
Toss
Eraser Stargazer LP
DFA 2015
La première
fois que j'ai déposé le magnifique vinyle vert sur la platine,
je me suis demandé pourquoi la chanteuse avait été
remplacée par un chanteur et comment se faisait-il que la musique
de Guerilla Toss n'était plus aussi énervée. J'ai
mis une face et demi à m'apercevoir que le vinyle tournait en 45
tours et non en 33 tours. Trop de couleurs nuisent à la raison.
Mais c'est là tout le syndrome de Guerilla Toss. On n'est jamais
trop sûr de ce qu'on entend. Et surtout à quoi on va s'attendre.
La musique de Guerilla Toss possède une élasticité
redoutable. Tu ne sais jamais dans quel sens elle va partir ni quand elle
va te péter entre les doigts. Cependant, tout en restant dans la
case des groupes bizarres, les cinq Bostoniens relocalisés à
New York ont su éviter la surenchère d'excentricités
et de funk-noise complexe et concassé, l'excès de tropicalité
qui rend gros et gras derrière les couleurs flashy et les lunettes
de soleil taille XXL. Ça se sentait déjà sur les
deux derniers maxis, Smack
The Brick et 367
Equalizer. Eraser Stargazer continue de faire le ménage.
Sous la basse bubblegum et les rythmiques pièces centrales
et chauffante des structures des compositions - qui se dansent autant
qu'elles démantibulent le corps, les échardes de guitares
aiguës et les synthés triturés, Guerilla Toss a le
souci d'écrire de véritables morceaux qui tiennent au ventre.
De la suite dans leurs idées loufoques. De la consistance pour
concilier Bush Tetras et Arab On Radar dans une valse perverse qui n'est
pas (que) débilité profonde. Guerilla Toss fait croire qu'il
est tout droit sorti d'un jeu vidéo alors qu'il est bien plus viscéral
et intelligent. Des petits malins qui aiment pisser de travers mais sans
jamais s'arroser les pieds. La face B est d'ailleurs la plus conséquente
avec notamment le titre Perfume teinté de post-punk et d'une
touche plus sombre, Big Brick plus agressif que dansant et Doll
Face On The Calico Highway, moins barré que la moyenne, plus
pénétrant, avec Kassie Carlson sachant varier les approches
d'un chant tour à tour parlé, crié, mélodique,
sinueux et parfaitement placé, ce qui n'a rien d'évident
dans ce foisonnement de rythmes tordus et de stridences coupantes ou amusantes.
Guerilla Toss a grandi mais reste tout de même une drôle de
bestiole dont le dernier méfait Eraser Stargazer est un
objet acide et haut en couleurs. Et pas que pour la pochette de Keith
Rankin.
SKX (25/04/2016)
|
|