deuil
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Deuil
Shock/Deny – 12''
Consouling Sounds 2015

Encore un disque que j’aurais pu chroniquer il y a plusieurs mois, puisque Shock/Deny a été publié à la mi-2015 par Consouling Sounds, label belge raclant largement du côté du post rock et du post hardcore depuis déjà de nombreuses années – on croise au hasard de son catalogue Amenra ou Thisquietarmy, ce qui est un échantillon assez réducteur mais permet de placer Consouling Sounds sur la carte des goûts et des couleurs. Un catalogue avec lequel Deuil colle parfaitement puisque le quatuor, belge également, oscille entre post hardcore, doom moderne et bien lourd, ambiant parfois et passages accélérés tirant volontiers sur le black metal. Une recette qui a fait largement ses preuves (les très pénibles Altar Of Plagues, par exemple) et dont avec le temps je me suis complètement lassé : trop de groupes du même genre, trop de clichés, trop de redites, trop de geignardises existentielles, bref toujours la même histoire du mec un peu blasé par ce qu’il écoute (dis moi tout de suite si cela t’emmerde lorsque je parle moi).

Shock/Deny fait suite à Acceptance/Rebuild (2013), un premier 12'' d’abord publié sous la forme d’un CDr autoproduit puis réédité en vinyle par une chiée de petits labels défricheurs. Un disque qui, à juste titre, avait donc valu à Deuil de se faire remarquer. Deux années ont passé et Shock/Deny présente les mêmes qualités que son prédécesseur avec ce mélange foisonnant mais savamment agencé de styles musicaux cités un peu plus haut, sauf que la production est dorénavant bien plus massive, plus lisible, en bref bien meilleure. Cette fois-ci Deuil a pris la peine d’aller dans un vrai studio et surtout a pris son temps pour enregistrer. Et les compositions, pourtant toujours aussi longues (quinze minutes chacune), sont comme plus resserrées, plus dynamiques et ne laissent pas de place à la moindre hésitation ni à aucune répétitions inutiles – toute la deuxième partie de Shock, maelstrom hypnotique de sables mouvants, me donne des frissons. L’originalité, le saint Graal musical du 21ème siècle pour celles et ceux qui n’ont pas encore compris qu’ils vont crever comme tout le monde, n’est toujours pas de la partie mais qu’importe : Deuil a des choses à dire et du talent pour le faire, ce talent qui consiste à avoir su choisir la voie qui lui convient totalement.

Le chant est l’un des grands gagnants de Shock/Deny. Un chant plus écorché qu’auparavant, plus vindicatif également et qui colle aussi bien au côté doom rampant qu’au coté black – qui larde Deny de fulgurances totalement assassines – de Deuil. Des hurlements de souffrance et de douleur. Mais sans l’ostentation misérabiliste de l’âme tellement en détresse. Alors on y croit. Moi, en tous les cas j’y crois à cette noirceur là, à ces gouffres sans fonds, à ces monstres et à ses démons souriants qui en surgissent pour nous dévorer, à ces questionnements sans réponses, à cette colère sans fin. Malgré son nom, Deuil est un groupe bien vivant, peut-être un groupe de survivants luttant désespérément contre cette pute de vie, mais un groupe qui ne se laisse pas faire. Exorcisme.

Hazam (19/03/2016)