chamanchomeur
becoq
atypeekmusic
|
Chaman
Chômeur
18759 - CD
BeCoq records/Atypeek Music 2016
Nouvelle force tellurique qui déboule du nord. Lille enfante un
trio dont le nom est un mystère et la musique, une grosse secousse.
Uniquement trois titres mais des titres qui lézardent et agrandissent
les moindres failles, sur un album qu'on appellera 18759 alors
que ce nombre ne doit être qu'une partie du dessin de l'artiste
tchèque Lubos Plny utilisé pour la pochette. Mais ça
sera toujours mieux qu'un anonyme self-titled.
Un power trio dont les membres n'en sont pas à leur premier et
seul projet. Qu'importe les noms du moment que l'ivresse soit là.
Chaman Chômeur respecte très bien la charte du label BeCoq,
c'est à dire se situant au carrefour du free-rock, de la noise
et de la musique improvisée (mais écrite). Le tout envoyé
avec passion et détermination. Et un zeste de folie. Ce qui fait
une sacré différence. Chaman Chômeur pointe dans le
monde instrumental, étire ses morceaux dont un, Nostalgie du
RMI, au-delà du raisonnable (le quart d'heure !), suscitant
peur et rejet d'un disque ne s'annonçant pas facile alors qu'on
se retrouve à la fin dans un état proche de celui provoqué
par L'Effondras.
La transe et l'hypnose en milieu sauvage.
A partir d'un blues trituré à l'extrême, le trio joue
sur la puissance, le volume, la densité et les contrastes. Une
approche sonore de chaque instrument au service de structures de compositions
toujours haletantes. Les convulsions saturés du noise rock, la
complexité et l'abstraction un rien cérébrale de
la musique libre et improvisée, la furie organique du free rock
et la beauté spectrale d'un blues urbain et déchirant.
La batterie explose la tronche dès les premières mesures
introductives de Hachis d'âne Halal (vous remarquerez au
passage la grande sagacité des titres). Le son vous rentre dans
le bide pour les cinq minutes les plus directes du disque tout en maniant
subtilement la mélodie. Suit le morceau préféré
du Medef, Nostalgie du RMI, pièce protéiforme qui
prend rapidement la tangente dans les dédales chimériques,
grouillants mais où le quasi silence n'est pas rare d'une longue
digression sépulcrale en mode free avant de retrouver peu à
peu le thème principal et d'augmenter crescendo la pression dans
des mesures répétitives et envoûtantes. Et toujours
ces coups de batterie qui rentrent dans le lard. Enfin, atmosphère
chargée en électricité sur le dernier titre Chômagique.
Dix minutes avec un guitariste sculpteur de saturation et de larsen, sifflements
persistants dans le décor virant à une grande bouilloire
surchauffée, effet répétitif et sobre rythmique en
boucle qui cogne. La transe rude et belle continue, combustible d'une
musique sauvagement fascinante et d'un premier album qui est loin d'être
un simple numéro.
SKX (20/04/2016)
|
|