brame


Brame
Basses Terres – CD
Self-released 2015

Brame et retiens la nuit. Nouveau cri de bête sous la lune déclinante. Basses Terres succède à La Nuit, Les Charrues. Musique de rues sordides, de ruines, de pays oubliés par les puissances divines. Basses Terres laboure un sillon plus épais et envahissant que jamais, remplissant l'espace d'une couche supplémentaire de charbon. Le son incomparable de la Gretsch baryton, l'harmonica, la complainte déchirante du condamné qui sait que tout est joué d'avance mais aussi les cailloux piétinés, les granulateurs, les tôles et tout l'attirail du sculpteur de sonorités, le duo naviguant du coté de Bordeaux continue de déclamer son blues scélérat et âpre à s'en pourfendre le cœur.
Une instrumentation et une approche singulières, ça passe ou ça lasse. On pourrait donc adresser à Basses Terres le même reproche fait au précédent album. L'impression d'écouter cinq fois le même morceau pour un album qui en plus ressemble trop à son prédécesseur. Mais Brame, c'est avant tout une histoire d'ambiance. Une putain d'ambiance à couper au couteau. Un parti pris radical qui joue justement sur une outrancière répétition et des morceaux au très long cours pour marquer son territoire, vous enfoncer plus bas que terre, au croisement des méandres d'un delta de Louisiane où rodent les ombres d'un True Detective et d'un puits de mine à l'abandon au fin fond de la Lorraine, un esthétisme aride et absolu qui interpelle et ne laisse pas insensible. Jusqu'à se cogner contre les murs.
Alors pour peu que vous soyez d'humeur et de préférence très sombre, Basses Terres peut se révéler dramatiquement beau et dur. Une pulsation interne, une sourde et profonde tension, un cercle infernal tournoyant dans le ciel rouge pendant que les corps tombent autour de vous. Seuls Étrangé (avec un certain Chritophe invité à la guitare) et Friches, prolongement de Fourches (avec le soutien du Ministère de l'Agriculture et de l'Industrie) se présentent plus apaisés et propices à l'apparition de fantômes ou la rêverie contemplative d'un monde qui se meurt dans une douleur silencieuse. Brame, c'est exténuant, c'est à se flinguer, ça sera pas tous les jours mais allez savoir pourquoi, on en redemande à chaque fois.

SKX (14/03/2016)