dais
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Sightings
Amusers And Puzzlers LP
Dais 2015
Sightings
n'est plus. J'en connais qui vont être soulagés. Par contre,
les oto-rhino-laryngologistes les pleurent, ça leur fera des clients
en moins. Quinze années à triturer en profondeur les tympans,
dix albums à donner des migraines à un poisson rouge, le
trio new-yorkais Sightings était une valeur refuge, un placement
sûr quand vous vouliez faire le vide autour de vous dans une soirée
mondaine. Ou être en paix avec votre humeur noire.
Pourtant, parmi tous ces groupes noiseux un poil extrêmes et expérimentateurs
dans l'âme, Sightings a toujours tenté de côtoyer le
rock, de rester dans les parages d'un cadre vaguement carré. Avec
plus ou moins de bonheur. La longue histoire de leur discographie connaît
des hauts et des bas, souvent au sein d'un même album. N'empêche,
Sightings semble quitter le grand cirque au plus haut de sa forme. Le
dernier album, Terribly
Well, figurait dans le haut de la liste de leurs meilleurs albums,
voir à la première place et ça tombe bien, Amusers
And Puzzlers a été mis en boite pendant la même
session d'enregistrement, comme un disque de complément, à
une époque où le trio ne savait pas encore que Amusers
And Puzzlers allait être son tout dernier disque.
Le parallèle avec Terribly Well est donc vite fait. Sightings
aurait pu en profiter pour faire quelque chose de totalement différent
- je ne comprends d'ailleurs pas trop le pourquoi de ce disque en même
temps, peut-être ont-ils eu pitié de nous en n'osant pas
sortir un double album de leur déluge sonore - mais Amusers
And Puzzlers est du même tonneau que Terribly Well, se
dégage une odeur de souffre à l'identique. C'est donc l'apothéose
de leur terrible son. Un agglomérat unique de crépitements
rythmiques semblant sortir des entrailles d'une machine mangeuse d'hommes
(un peu comme chez Dial
sauf qu'avec Sightings, c'est un batteur, un vrai), un fourmillement de
fritures, de saturations, d'éclairs électriques, de gerbes
de larsens, de désossage d'une carlingue encore fumante, de sifflements,
de stridences se cognant contre les parois d'une pulsation violente et
convulsive. Car le batteur peut aussi taper droit, tout comme le bassiste,
le chanteur faire sentir toute la rage de son déséquilibre
hormonale et vous embarquer dans un raffut d'enfer. Noise et rock et industriel
comme sur le début de 13 avec cette basse (à moins
que ce soit la guitare) qui se fait passer à merveille pour un
marteau-piqueur sans jamais se départir d'un truc de malade qui
vous pèle les nerfs, d'une intensité qui rend dingue, à
mi-chemin entre une musique d'autistes improvisée et un élan
suicidaire de punks voulant se faire cracher à la gueule non sans
avoir foutu le feu à tout le quartier auparavant. Avec des titres
comme Counterfeited, 1982 ou I Steal From My House,
vous avez l'équation idéale entre Whitehouse et Lightning
Bolt, la destruction et l'acharnement.
Comme sur tous les albums de Sightings, vous avez hélas le morceau
à zapper avant la fin. Cette fois-ci, c'est Syllabus of Errors.
Il dure seize minutes. Long, très long périple au pays du
drone trituré, des vibrations stressantes et des ondulations fantomatiques
sans la propulsion et la tension pour s'accrocher. En trois minutes, son
sort aurait pu être réglé mais Sightings a toujours
aimé se faire détester. On en gardera pourtant un bon souvenir
dans une discographie où il faut certes faire le tri mais avec
d'excellentes surprises et des agressions sonores personnelles et jouissives.
Merci à Richard Hoffman, Jon Lockie et Mark Morgan. Paix à
leurs âmes, ils en ont bien besoin.
SKX (14/10/2015)
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