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Quttinirpaaq Dead September LP Rural Isolation Project 2015 A chaque fois, c'est pareil. On pense que ça va pas le faire, que tout ça c'est beaucoup trop de bruit mais je ne sais par quel miracle, Quttinirpaaq trouve toujours le moyen de vous plonger dans les affres de son monde parallèle, vous hypnotiser avec des saturations au-delà du seuil du tolérable. Dead September est le troisième album de Matthew Turner, un projet solo et non un groupe comme j'avais pu le penser sur les deux albums précédents, ce qui n'enlève rien à la couche de bordel que ce Texan est capable de foutre. Et il le prouve une nouvelle fois avec les huit titres de Dead September. L'esthétique générale ne change pas vraiment. Épaisses et folles couches de dissonnances, de larsens et d'une perverse et transperçante saturation permanente, l'impression qu'un nuage de frelons asiatiques s'abat sur les épaules, s'introduit par les oreilles et vous bouffe la cervelle. Vrillage maximal, chance de survie minimale. Et ça, dès le titre d'ouverture, un Bleed Out cauchemardesque avec un beat mécanique intraitable. La lucidité voudrait qu'on fuit tout de suite mais Quttinirpaaq prend au piège dans sa machinerie infernale, un doux parfum d'extrême et de soumission, la bête prise dans les feux de la bagnole et qui ne peut plus bouger. White Witch et son feeling Suicide peut donc enchaîner, vous êtes mûrs pour une ballade dans des paysages qui feraient déguerpir Chrome et Helios Creed. Climats industriels, c'est répétitif, lancinant avec dans le fond un truc que vous pensez bien être une voix mais tellement noyée sous le déluge qu'elle arrive inaudible. Et quand vous êtes au fond du trou, Quttinirpaaq vous attend et délivre un vrai rythme de batterie sur Dead Birds, un riff vérolé et tournant en boucle pour une remontée vers des ambiances plus rock et humaines (à la seule condition de penser que Butthole Surfers est un groupe rock et humain), avant de vous submerger graduellement par une nappe de bruits avançant irrémédiablement, une immense nasse de claustrophobie venant à bout de vos dernières volontés. Superbement dingue. Quttinirpaaq, c'est aussi une certaine idée d'une techno-indus dark, noise et minimaliste avec Lifestyles Ussr (baptisé Lifestyles Ussa sur son bandcamp) prenant la moitié de la face B. Un vent froid et encore plus malade parcourant de vaste étendues abandonnées, traversées par des voix de l'au-delà et la démonstration au final que Matt Turner est passé maître dans l'art d'engendrer des ambiances incomparables, ardues, de créer le malaise, de dépiauter un corps à l'eau chaude tout en amenant l'auditeur à un niveau d'extase sonore totalement obsédant et diaboliquement onirique. Quttinirpaaq, ça ressemble à une formule magique, un sort qu'on jette sauf que vous en ressortez grandi alors que tout portait à croire que vous n'alliez pas vous en remettre. SKX (27/05/2015) |