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Girls
Pissing On Girls Pissing Scrying In Infirmary Architecture LP Muzai 2015 D'habitude, Girls Pissing On Girls Pissing sort des livres et glisse un coupon de téléchargement à l'intérieur. C'était le cas en 2011 avec Tangiwai et 2013 avec Eeling. Cette fois-ci, ils ont mis le livre à l'intérieur d'un vinyle, ce qui, techniquement parlant, pourrait faire de Scrying In Infirmary Architecture leur premier véritable album. Un livre de trente pages avec les paroles et des illustrations, collages par trois membres de Girls Pissing dont la pochette est censée représenter la Grande Prostituée de Babylone, la Bête et un truc comme la naissance de l'univers. Ou quand le message Divin est souillé pour servir ses propres intérêts, détourné de son sens originel pour assouvir sa soif de pouvoir. La métaphore prend en ce jour un écho étourdissant. Les Néo-Zélandais aiment le bizarre, le mysticisme, jouer avec l'occulte, détourner les codes, brouiller les pistes d'influences disparates pour en faire un mélange de plus en plus personnel. A tel point que la musique de Girls Pissing perd de plus en plus ses oripeaux de corbeaux pour trouver un bout de soleil parcouru d'ondes mélodiques aussi grandioses que surprenantes. Sortir de sa profonde mélancolie et son nihilisme rampant pour vibrer dans des territoires oniriques et troubles, l'impression que ça va se casser la gueule à chaque instant, comme s'ils tentaient d'écrire une chanson pop en bonne et due forme mais que c'était rendu impossible par leur propension naturelle à tordre le cou à la réalité, la transformer à travers un prisme angoissant, toujours un peu lugubre. Ombre et lumière. Cela donne des titres étonnement beaux, voir carrément ensorcelants comme A Fraud Abroad, Ceramic Miscarriages ou Scrying avec ces refrains qui font léviter, le mélange chants féminins et chant masculin de Casey Latimer dans lequel pointe sans cesse une (grosse) pointe de folie, sans oublier le singulier Rainbow Islands. Girls Pissing n'a jamais composé un titre aussi mélodique et évident. Je pourrais me l'écouter en boucle. Même quand débarque la controversée ligne de saxophone (par l'invité Peter Ruddell). Sublime de bout en bout. Avec Scrying In Infirmary Architecture, les cinq Néo-Zélandais ont réussi à construire un album sec et velouté, dépouillé et rempli d'arrangements comme autant de détails précieux, à caresser dans le sens du poil tout en restant inhospitalier et grimaçant. Ils ont affiné le propos sans rien perdre de leur acidité comme sur Pollen Moon ou Darwining, de cette attirance pour le désespoir, un puits profondément sombre qu'ils savent, d'une manière unique, rendre fascinant pour vous faire plonger dans leur souterrain grouillant de sirènes difformes et de flammes déchirantes. Le genre d'album qui ne ressemble à rien d'autre, vous remue, vous parle intimement, et que vous chérissez tout autant pour un groupe à forte personnalité engagé tout entier dans son art et développant un univers absolument aliénant. SKX (14/11/2015) |