enablers
exileonmainstream
lancashiresomerset
|
Enablers
The Rightful Pivot - LP
Lancashire and Somerset/Exile on Mainstream 2015
Il va bien
falloir se lancer dans la chronique du cinquième album d'Enablers.
Plus d'un mois qu'il tourne et retourne sur la platine et je suis comme
un lendemain d'élections départementales, je ne sais pas
si je dois en rire ou en pleurer. C'est assurément l'album le plus
introspectif, le plus spleenesque, le plus détendu et poétique
du groupe de San Francisco. Et aussi le plus ennuyeux.
Certains jours, cet album passe largement au-dessus de ma pauvre petite
vie de terrien, Enablers lévitant à des hauteurs tellement
vertigineuses que ça ne m'en touche pas une. Des morceaux comme
She Calls After You ou Good Shit, j'ai beau être attentif,
je décroche toujours lamentablement avant la fin. Quand c'est pas
l'album dans son entier pour peu que la concentration ne soit pas suffisante.
Car bien sûr, ce n'est pas le genre d'album que tu écoutes
en faisant la vaisselle. Une histoire d'équilibre sans doute ce
Rightful Pivot, trouver le bon angle pour apprécier et se
laisser envahir par les effluves mélancoliques et les passages
atmosphériques plus marqués que d'habitude. Et parfois,
ça marche. Des accords plus pénétrants que d'autres,
deux guitares dont le maillage ouvrent des portes lumineuses, une ambiance
nébuleuse débouchant vers un transport des sens où
il est permis de s'élever avec le groupe comme sur le dernier titre
Enopolis avec l'arrivée de la trompette de Paul Watson.
Un poète/chanteur à la diction toujours aussi prenante (même
si je ne pige pas un mot de ce qu'il dit) s'énervant (West Virginia)
ou sortant des fuck tous les trois mots sur le morceau d'ouverture
Went Right. Suffisant pour le suivre sans broncher. Enablers n'a
pas perdu ses tours de magie. Cependant, Enablers apparaît moins
tendu qu'auparavant
et opte pour des chemins plus veloutés. Le nouveau batteur Sam
Ospovat n'est sans doute pas étranger à cette évolution.
Son jeu est plus fluide et free que son prédécesseur Doug
Sharin dont la frappe était plus franche (et encore crédité
aux arrangements sur deux titres, Solo et West Virginia).
Les deux guitaristes Joe Goldring et Kevin Thomson mettent également
moins d'ardeur et de génie pour tisser des tableaux de combats
où la tension n'est plus aussi omniprésente. Coulé
Enablers, lente chute dans le cotonneux.
Alors on nage dans des compositions amoindries, dans l'entre-deux, des
inspirations jaunies, le trop plein de subtilités qui laissent
sur la bas-coté avant de revenir sur le devant, le temps de resserrer
le propos, le temps d'un Look dont chacune des dix minutes n'est
pas essentielle mais résume assez bien le jeu de montagnes russes
sur lequel se ballade The Rightful Pivot. Entre atmosphère
aérienne, limpide et envolée plus épique et entremêlée,
chur mélodieux de Kevin Thomson et sobre narration de Simonelli,
arpèges tendant à s'effacer sous le poids du spleen avant
que ces mêmes arpèges délivrent des sonorités
envoûtantes.
Il est permis de passer à coté de The Rightful Pivot.
Il est aussi permis de se laisser divaguer au gré de morceaux insaisissables,
contemplatifs, délivrant d'obscurs moments de beauté. En
tout cas, Enablers continue d'explorer son bout de terrain, de faire du
Enablers tout en se laissant porter là où le vent les pousse,
quitte à s'estomper dans le paysage.
SKX (30/03/2015)
|
|