donaman








Don Aman
Tricératops – CD
Self-released 2015

Don Aman aime brouiller les pistes. Comme mettre un joli piaf colorée sur la pochette et appeler son premier album six titres Tricératops. Ça lutte pas franchement dans la même catégorie. Ou prendre comme nom de groupe un morceau du mythique album Spiderland de Slint et ne pas faire du Slint. Quoique sur ce dernier point, il pourrait avoir matière à débattre. Après tout, ce nouveau groupe de Dijon peut être cataloguer à la va-vite dans le genre très fourre-tout de post-rock. Dans ceux qui ne rockent pas vraiment, qui accordent de l'importance à un peu, beaucoup de sensibilité dans ce monde de brutes, laissent de la place dans leur interprétation aux non-dits, au silence, à l'espace entre les instruments et à une tension sous-jacente. Mais non pourtant, aucun risque de confondre les deux groupes.
Don Aman est un groupe globalement beaucoup plus bruyant et virulent, n'hésitant pas à prolonger les explosions, à lacérer le paysage de saturations, de grésillements mais toujours dans le contrôle et une certaine harmonie. On peut même avancer que Don Aman baigne ses compositions dans une aura mélodique plus pop, voir trop sur certains passages, le chant notamment, trop affecté et maniéré, notamment sur le pénible Le Tigre, seul titre vraiment dispensable de Tricératops. Mais Don Aman sait contrebalancer tout ça et réguler son trop plein de délicatesse par une basse mélodique et inspirée virant dans la vibration sale sur la fin de Call It A Bunch, des rythmes tribaux plus appuyés, faire suer les foules sur l'enlevé instrumental Tricératops et achever tout le monde par les onze minutes de Solzimer. Un titre commençant tout doucement pour faire peu à peu monter la sauce et déboucher sur un passage aussi bruitiste que surprenant, avant de revenir à de plus calmes et pop intentions et terminer plus intensément dans de belles sonorités graves provoquant une certain envoûtement. Le résumé de tout un disque en un seul morceau. Le trio donne l'impression de ne pas donner de limite à sa créativité, allant là où bon lui semble. Ou alors, c'est juste qu'il n'a simplement pas encore réussi à bien définir son style. Dans tous les cas, Don Aman mérite amplement qu'on s'attarde sur ce premier jet et la suite sera surveillée avec intérêt.

SKX (01/12/2015)