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The Body & Thou
Released From Love/You, Whom I Have Always Hated - CD
Thrill Jockey 2015

Ceci n'est pas un split. C'est une collaboration où les musiciens de Thou et The Body s'unissent pour le meilleur et pour le pire. Alors quand les metalleux/sludge/doom de Thou dont je n'ai jamais entendu parlé malgré leurs nombreux albums se mélangent avec le duo metalleux/sludge/doom de The Body dont on n'a pas toujours parlé en bien, cela ne donne pas exactement un disque de poètes.
Techniquement parlant, les six nouveaux titres de You, Whom I Have Always Hated sont couplés, uniquement sur la version CD, avec les quatre titres de Released From Love qui eux n'étaient sortis qu'en vinyle courant 2014. Car le fruit de la collaboration entre les deux groupes en ait déjà à son deuxième essai. C'est qu'ils aiment ça les salauds.
Musicalement parlant, c'est la guerre. Double batterie, double ration de guitares et de cordes en général pour saturer les plus récalcitrants et encore plus de chants de bêtes prises au piège. Le très bon point, c'est que Bryan Funck, le chanteur de Thou, a pris le dessus sur les cris de vierge effarouchée de Chip King, la goule de The Body, relégué la plupart du temps au second plan, fondu dans le mix et complétant ainsi finalement assez bien la voix noueuse proche du point d'étouffement de Funck.
Double dose de violence, double dose de désespoir et triple dose de fin du monde. Le monstre engendré ne prête pas le flanc à la détente. Broyage des cotes, pilonnage des cervicales, lourdeur écrasante sans strictement aucun souci de mettre un bout de riff un tant soit peu aguicheur, gravité démesurée de la rythmique, les deux groupes développent une terreur proche du génie, parce qu'à ce niveau là, ce n'est plus humain. On a le droit de trouver ça éprouvant, usant et c'est sans doute vrai, étouffant, même si les deux entités aménagent quelques plages de secours pour reprendre son souffle mais même là, les nuages noirs volent très bas.
Metal radical, climat apocalyptique, saisissante sensation d'écrasement et d'aliénation, nihilisme nauséeux comme sur le rouleau-compresseur The Wheel Weaves as the Wheel Wills ou Manifest Alchemy, il faut faire preuve d'un peu de don de soi pour apprécier ce disque où les deux groupes ne font plus qu'un pour mieux te manger mon enfant. Le metal extrême foule des terres d'un Swans en mode panzer désireux d'aller au-delà des frontières d'un genre, à tel point qu'ils reprennent Coward de Vic Chesnutt pour encore plus te plonger au fond du trou d'un titre sous le déluge qui leur va finalement comme un gant dans leur désolation crasse avec cette tirade de guitare agonisante. Terrible Lie de Nine Inch Nails passe également sous le joug de leur folie rampante, réussissant ainsi à rendre très comestible ce pénible morceau à la base transformé en boule de violence et de frénésie. Ça ne sera pas le disque de tous les jours mais il faut saluer cette entreprise de destruction massive, ce puits sans fond et aimer s'y jeter de temps à autre.

SKX (29/01/2015)