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Betunizer
Enciende Tu Lomo – LP
BCore Disc 2015


Betunizer, c'est le même combat que Lungfish ou Spray Paint. Au bout de quatre albums en cinq ans, c'est un peu, beaucoup, toujours la même chose. Je sais de quoi je cause, je viens de tous me les taper en une seule petite journée. Sauf qu'ils vous diraient que c'est pas vrai et que peut-être bien que les trois Espagnols auraient raison et que de toute façon on s'en fout parce qu'au bout de quatre albums, c'est toujours bien, même mieux que bien et toujours immensément plus mieux que beaucoup moins mauvais.
Et pour le coup, sur Enciende Tu Lomo, les trois de Valence ont encore appuyé sur la pression faisant couler un filet d'intensité qui donne grand soif. Il paraît qu'en concert, c'est encore plus de pression et pas seulement parce qu'ils jouent souvent dans des estaminets. On a pu en voir un aperçu le 12 novembre dernier au Bar'Hic à Rennes. Sauf que le chanteur-guitariste a mis un peu trop de pression sur son instrument, ça a fait ricochet sur son ampli. Puis deux. Voir trois, je sais plus trop mais c'était le bordel, encore plus pour le groupe local en première partie qui avait prêté le sien d'ampli. Et qui faisait la tête. Je parle du groupe bien sûr. Tout le monde s'était affairé pour que ça reparte mais le fil de la pression avait pris un coup de jus. Mais ce qu'on avait vu montrait bien que Betunizer avait de la ressource et Enciende Tu Lomo est sûrement l'album représentant le mieux cette fougue et cette passion électrisante. Quitte à tout cramer.
Le groove des Espagnols est unique, une marque de fabrique qu'ils portent une nouvelle fois au panthéon des danseurs fous. La façon de se mouvoir, de déclamer les paroles dans leur langue natale, les interactions entre les instruments, la complexité décomplexée, l'étonnante fluidité qui en découle, la suite est logique après Grand Veta. Avec encore plus de sauvagerie, de bruit dans la guitare, de fougue et des titres qui embarquent tout sur leur passage comme le fiévreux Oleada, les énormes six minutes de Pantalon Blanco Ajustado et la trompette essayant de se frayer un passage, la courte ruade de Con La Pajara En Los Talones et des fins de morceaux qui coupent le souffle parce que Betunizer arrête uniquement son groove infernal quand vous avez un genou à terre. Voir les deux.
Betunizer largue les amarres et calcule de moins en moins malgré les mesures impairs et la rythmique tournoyant dans le rouge du ciel. Leur noise-rock est flamboyant, original. Et merci de ne pas les comparer à ces vieux croulants de Shellac qui n'ont pu rien à dire depuis longtemps (mais qui le disent quand même). Betunizer ne rend pas hommage à Shellac sur le premier morceau intitulé José Camilo Shellac mais se fout de la gueule de tous ceux qui n'arrêtent pas de les comparer au groupe d'Albini le grincheux (l'hommage serait plutôt pour l’écrivain espagnol). Betunizer est tellement différent, plus inventif et passionnant. Betunizer peut encore écrire des tonnes d'albums comme Enciende Tu Lomo, je serais toujours preneur.

SKX (14/12/2015)