yvette
godmode



Yvette
Process - LP
God Mode 2013

Pas évident de prendre au sérieux un groupe qui s'appelle Yvette. Pourtant, ce duo new-yorkais présente une musique menaçante et cabossée comme un accident industriel. Mais ils sont américains, ils ne pouvaient pas savoir. Yvette est donc un duo batterie-guitare et sa guirlande de pédales d'où sont extirpés stridences et martèlements avec le soutien de synthés et des vacheries électroniques sifflantes au-dessus de nos têtes. Yvette embrasse le art-noise comme nombre de ses collègues new-yorkais, c'est autant physique que cérébral, et s'inscrit dans le sillage de Pop. 1280, Neptune, Liars ou White Suns. La guitare se confond avec l'électronique, on ne sait plus qui est qui, même les sons de batterie sont transformés. Bombardements de métal froid distordu ou chauffé à blanc, rythmes tribaux, crissements convulsifs, déraillement des cordes, pédales d'effets qui brouillent l'audition, sonorités inquiétantes et lugubres, ce duo fait du bordel comme douze.
Mais en dépit de tout cet attirail de dentiste-fraiseur névropathe, Yvette orne l'air d'oripeaux aguicheurs descendant en accordéon pour assouplir nos peurs. Le rythme peut se faire entraînant (Mirrored Walls ou Attrition), des gimmicks rassurants apparaissent pour guider nos pas, Yvette garde une approche rock et ne fait pas du bruit pour le seul plaisir de nous niquer les tympans. Et puis la voix surtout, élément le plus harmonieux, et de loin, tentative de mélodies célestes surfant au-dessus des barbelés. Histoire de contraste pouvant rendre la pilule aussi bien digeste que agaçante. On aimerait parfois qu'il lâche un cri libérateur, qu'il hurle avec la meute et sorte d'un certain état cotonneux et détaché. Yvette tempère. Noah Kardos-Fein et Rick Daniel, ceux qui se cachent derrière Yvette, n'ont pas réussi l’amalgame parfait. Process souffre parfois de plans qui tournent en rond, de morceaux sur la corde raide et d'une certaine monotonie/froideur. Mais il reste un premier album percutant dans l'ensemble, alliant une volonté très séduisante de recherche de textures sonores originales tout en restant dans un cadre plus ou moins carré à l'intérieur duquel circule une énergie rock. Yvette, t'es chouette.

SKX (18/02/2014)