Brouillard de l'infini, Wreck And Reference revient troubler les pistes. Duo inattendu semant des pierres bancales dans un flot marécageux, il faut avoir le sens de l'aventure et une confiance aveugle en son prochain pour vouloir se baigner dans Want, deuxième album du groupe californien. Les armes à leur disposition n'ont pas évolué depuis la dernière lune. No Youth, no guitare, no basse. Une batterie tenue par Ignat Frege, un sampler diabolique/chants multiples intonations de Felix Skinner et une vision radicale. Celle qui transforme le metal en chair plus noire que noire, un metal dépouillé de tout ces oripeaux pour ne garder que l'extrême et la rage. Celle qui broie l'electro en une pluie acide et synthétiquement modifiée à l'énergie punk. Celle qui transfigure une vibration dark-ambient minimaliste en théâtre de croque-mort n'ayant pas peur de l'outrancier et du grandiloquent. Wreck And Reference continue d'avancer sur un chemin épineux semé d'embûches plus grosses que leur désir de bousculer les habitudes. Et à ce rythme là, à trop vouloir jouer au grand méchant loup, Wreck And Reference n'évite pas le surdosage. Glace les sangs en gelant les émotions. Bloc déshumanisé qui n'incite pas à la pénétration. Mais il faut également reconnaître à cet album un pouvoir d'attirance funeste, une beauté froide et orageuse. Nappes de synthés et hystérie vocale de chien enragé, batterie martiale et murmures inquiétants, troubles profonds de la personnalité relevé par l'éclat d'un piano, rythmes s'enfonçant dans le sol, grouillements de rats électroniques sur son lit d'atmosphères sinistres, sauce piquante. L'alchimie peut faire des miracles pendant une bonne poignée de morceaux convaincants. Contraste saisissant entre des morceaux désossées, construits à partir de trois fois rien et la violence s'en dégageant. De la confusion des sentiments naît un album qui ne laisse pas indifférent, provoquant autant le rejet que la fascination. Si les premières écoutes n'ont pas été dans le bon sens, que certains morceaux font perdre le fil de l'intensité, force est de reconnaître que Wreck And Reference a encore publié un album qui interpelle et poursuit son cheminement personnel avec ses imperfections.

SKX (27/11/2014)