theeohsees
castleface

Thee Oh Sees
Drop - LP
Castle Face 2014

Il y a quelques mois à peine, l’omniprésent John Dwyer avait annoncé la mise en sommeil et pour une durée indéterminée de son groupe phare Thee Oh Sees. Aussitôt brunettes tatouées fans de nail art et jeunes garçons en pleine révolte avaient poussé des cris de stupeur et d’incompréhension : Non ! Ce ne pouvait pas être la fin de Thee Oh Sees, le meilleur groupe du monde ! L’hibernation n’aura cependant duré que trop peu de temps. Juste celui, pour Dwyer, de présenter un énième nouveau projet (en solo : cela s’appelle Damaged Bug et c’est parfaitement inutile) et d’annoncer la reformation, concerts à l’appui, de The Coachwhips – en bon vieux noiseux intégriste, réactionnaire et débordant de haine j’aurais préféré une reformation de Pink & Brown voire même de Dig That Body Up, It's Alive, reformations que j’aurais bien évidemment boudé puisque c’était forcément mieux avant. Mais nous revoilà donc avec un nouvel album de Thee Oh Sees. Pas un album posthume et ramasse-miettes, non, un vrai album avec neuf chansons inédites et qui annonce de nouveaux concerts (le groupe sera en Europe au mois d’août). Il est plutôt rigolo, John Dwyer : il ressemble à la fois à un garçon coiffeur – dommage qu’il ne porte pas la moustache de façon permanente – et à un surfer ; surtout il a enregistré avec Thee Oh Sees quelques uns des meilleurs disques de la décennie passée en matière de garage 60’s et de pop psychédélique. Sans aucun complexe, qui plus est : genre je joue la musique que j’aime et que j’ai envie d’entendre. Point barre. Une attitude qui semblait garantir la fraicheur du projet, son côté immédiatement colle-au-cul aussi, ah oui pas facile de se débarrasser de la musique de Thee Oh Sees une fois que l’on a écouté – et aimé – l’un des nombreux LPs du groupe, toujours constellés de myriades de tubes. Chacun a son ou ses albums préférés de Thee Oh Sees mais Drop, le fameux album post hiatus avorté, est le disque que le groupe n’aurait pas du publier (ou alors dans quelques années, pour finir de payer les traites de la maison en bord de mer ou les études du fiston). Et on regrette immédiatement que Dwyer et sa bande n’aient donc pas tenu parole, qu’ils ne se soient pas effectivement contentés de faire autre chose pendant une durée supérieure à celle de la gestation d’une lapine. Car sur Drop Thee Oh Sees tournent en rond, n’arrivent pas à dépasser leurs références et surtout manquent cruellement de cette immédiateté qui faisait passer la pilule acidulée du revival 60’s. Que ce soit sur les titres gentiment électrifiés (Drop), les pochades niaiseuses (Put Some Reverb On My Brother) ou les balades aux arrangements chiadés (The Lens, une vraie lennonade mais loin d’être aussi réussie que celles enregistrées par le padawan Ty Segall), c’est l’absence de conviction et d’électricité qui assassine une discographie jusqu’ici largement au dessus du lot. Mais le pire est sans aucun doute le morceau d’ouverture : Penetrating Eye semble tout droit sorti d’un album des White Stripes, le groupe qui il y a un peu plus de dix ans avait marqué la renaissance du rock’n’roll, le vrai, celui avec des grosses guitares. Ce même rock’n’roll mort en même temps que Kurt Cobain dix années encore auparavant. Ce qui prouve bien qu’à chaque génération correspond son colosse aux pieds d’argile. Lala lalala lala lalala la…

Hazam (02/05/2014)