lepetitmignon
horaciopollard
staer





Staer/Horacio Pollard
Split – 7''
Le Petit Mignon 2014

A l’heure où les prodiges norvégiens de Staer sont repartis pour une énième virée – Scandinavie, Europe de l’Est, Europe balkanique et Italie, tout ça en compagnie de Poino –, il serait temps d’évoquer ce split single publié lui à l’occasion de la précédente tournée européenne de Staer, au printemps 2014. Une publication signée Le Petit Mignon, maison de disques très arty et abritée par Staalplaat, label vétéran de l’activisme européen question musiques expérimentales, à cheval entre Amsterdam et Berlin.
Voilà un disque que l’on remarque d’abord pour son artwork exubérant et coloré comme un rêve de rainbow shower en compagnie de poneys magiques car, comme pour toutes les autres publications du Petit Mignon, un graphiste a été invité à se lâcher et ici c’est Dave 2000 (il a pas mal de publications chez Le Dernier Cri et chez Bongoût) qui s’est étalé de tout son long sur une pochette qui se déplie en trois parties. Le vinyle est lui tout transparent ; l’ensemble est limité à 200 exemplaires numérotés et semble sold-out, aussi bien auprès des groupes participants que du label. Donc si j’évoque cette galette aujourd’hui, c’est uniquement mu par la névrose obsessionnelle du record geek, celle qui pousse le fanatique à parler de tout ce qu’a enregistré un groupe qu’il adore par dessus tout.
Mais n’allons pas trop vite en besogne… car si on commence l’écoute de ce split par la face occupée par Horacio Pollard, on ne pourra que se rendre à l’évidence, terrible mais sans appel, que le bonhomme en question fait partie de ces
musiciens/artistes/performers dont au contraire on ne recherchera pas tous les disques coûte que coûte. Fort heureusement, le cumul de ces trois titres de pimpo-bimbo gastro-expérimental dépasse à peine les cinq minutes : si l’ensemble se révèle certes moins ennuyeux et moins soporifique qu’un concert d’Horacio Pollard, cela nous laisse tout juste le temps d’aller vider les poubelles dans l’arrière-cour puis de revenir. Désolé Horacio mais tes gamineries et bidouilles ne m’amusent guère ; elles manquent soit de cette profondeur qui incite à une écoute véritable soit de cet humour qui pousse au rire. Une autre fois, peut-être.
Passons donc à la face Staer. Et là, c’est à la fois une (petite) déception et une (immense) confirmation. Ce qui signifie que Staer fait du Staer et rien d’autre. Vous me direz que c’est déjà beaucoup : j’adore toujours autant la noise magmatique et circulaire de ces norvégiens tandis que la maîtrise destructrice du groupe atteint de nouveaux sommets sur ce Dresden Dynamo… Mais après ? Après, Staer, apparu comme par magie il y a presque trois ans et depuis propulsé nouvelle éclaboussure ultime dans un monde propret et dominé par les républiques bananières de la noise festive, est condamné à faire toujours plus fort, toujours plus fou, toujours plus intense et toujours plus excessif. Tout donner puis crever : cela semble être la seule porte de sortie si on ne veut pas finir par pourrir. À moins que les trois musiciens de Staer – qui après tout ne sont encore que des gamins idéalistes – soient de la trempe de ces génies définitivement inventifs, foutraques et touchés par une grâce sans cesse renouvelée. Rêvons donc encore un peu en attendant le troisième album du groupe. Et merci les poneys magiques.

Hazam (30/09/2014)