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Sheik
Anorak Keep Your Hands Low LP S.K., Gaffer 2014 L'illusion est parfaite. Et bluffante. Sheik Anorak donne l'impression d'être un groupe avec, sans exagérer, au moins quatorze musiciens alors qu'il est un groupe à lui tout seul. Un one-man-band d'enfer connu sous le prénom de Franck, boss de Gaffer records depuis son QG lyonnais et homme de projets multiples dont les présentations avaient été faites deux ans auparavant. Seul mais déplaçant de l'air comme un troupeau de gnous en pleine migration et faisant du bruit comme douze tonnerres descendant des montagnes. Et ce n'est pas qu'une question de volume sonore mais aussi et surtout d'architecture. Interaction brillante et coulant de source entre des guitares, une basse, une batterie et une palanquée de pédales d'effets avec, et ça c'est nouveau, le beau brin de voix de Franck. Jamais la sensation de boucles ou de bricolage hasardeux ne se font sentir. Les différentes mélodies se superposent, se croisent, s'emberlificotent entre elles ou avec la batterie trépidante avec une précision diabolique et un naturel confondant. Sheik Anorak se permet ainsi de creuser ses morceaux, les rendre complexes, se faire passer pour plusieurs, en remettre une couche et on y voit que du feu. Idem pour le travail d'enregistrement et le mixage qui ont fait chauffer l'ordinateur et les sonorités authentiques qui en découlent. Mais si on aime Sheik Anorak, ce n'est pas pour sa maîtrise des aspects techniques mais pour sa capacité à les faire oublier et composer de putains de bons morceaux. Les mélodies sont princières avec un effet de cycle frénétique et palpitant renvoyant au cercle de la pochette et sa myriade de motifs brisés qui vous hypnotisent comme sur le superbe premier morceau qui a donné son nom à l'album ou sur The Summit, des éclats de guitares qui vous transpercent de partout et une façon unique de faire monter l'adrénaline. Sheik Anorak surprend également par sa capacité à faire évoluer une compo comme sur les sept minutes de Stuck in There. Un titre très mélodique qui va peu à peu passer sous un déluge de feu, se faire sérieusement malmener par des tombereaux de rythmes infernaux et s'achever dans une fin bruitiste. Et le bruit, Sheik Anorak aime ça, quand ça couine, que ça sature et perce les tympans avec la fin du bien nommé Blood et son prolongement, What We've Left Behind, et son final à fond la gomme. En fait, Sheik Anorak aime tout. C'est pour ça qu'il joue dans des tonnes de groupes aux styles différents. Alors quand il est seul face à lui même, il est pareil et Sheik Anorak ne transige pas, met tout ce qu'il aime sur un même disque. Le bruit, le soufre, les mélodies, le free-rock, le déluge, les arpèges qui rendent beau, les riffs qui saignent et une reprise des Beatles, Tomorrow Never Knows avec Mathilde au chant, la chanteuse de Socrates, encore un autre groupe avec Sheik Anorak dedans et qui n'a hélas pas continuer assez longtemps. Keep Your Hands Low devient donc un album supérieur à Day 01, plus compact et cohérent, une qualité de compo qui va de l'avant pour huit titres sans faiblesse et lumineux. Une vraie tornade et un album généreux cultivant son originalité dans sa conception et le rendant indispensable pour la robuste émotion qu'il procure. SKX (04/04/2014) |