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Louis Minus XVI
Kindergarten – LP
Baboon Fish Label/Do It Youssef/Love Mazout/BeCoq/
Tandori records 2014

Louis Minus XVI – prononcez [louisse minusse seize] – est un quartet originaire du côté de Lille. Kindergarten est le deuxième et encore tout récent album du groupe après un Birds And Bats publié lui à la fin de l’année 2011. Un premier album aussi captivant qu’enflammé mais qui n’a jamais eu l’honneur d’être chroniqué dans les pages pourtant avisées de Perte & Fracas, à croire que pendant les trois années où j’avais totalement disparu de ce webzine il ne s’y est pas passé grand-chose parce que que le patron en a profité pour rien foutre. Rattrapons donc ce retard.
Mais commençons par faire les présentations. Dans Louis Minus XVI on trouve deux saxophonistes, Adrien Douliez à l’alto et Jean Baptiste Rubin au ténor ; on trouve également Maxime Petit à la basse électrique et intraitable ainsi que Frédéric L’Homme à la batterie. La musique de Louis Minus XVI est un pur bonheur contemporain – ie : de maintenant – puisque voilà un groupe qui sait puiser dans le (free) jazz, le (noise) rock ou l’avant-garde (ahem…) sans donner l’impression de créer une mixture artificielle, de procéder à des calculs de musicologues, de fusionner le bon goût des salons où l’on cause avec l’électricité détournée du four à micro-ondes de bonne-maman. On a quand même cette chance, en ce moment, d’avoir la possibilité de se mettre entre les oreilles des groupes et des musiques aussi inventives, non formatées et aventureuses que celles de Loup, IRèNE, Jean-Louis, Kouma ou Lunatic Toys et Louis Minus XVI, avec sa propre personnalité, fait assurément partie de ce peloton de tête.
Et ce n’est pas avec Kindergarten que je vais changer d’avis. Bien au contraire. De plus, ce deuxième album a l’avantage et l’intelligence de ne pas nous resservir tels quels les mêmes plats qui nous avaient déjà rassasiés sur Birds And Bats. Un titre comme La Marche, placé en tête de gondole, rappellera certes que Louis Minus XVI sait en imposer (et justifiera à lui seul le terme de basse « intraitable » utilisé un peu plus haut) mais sur les quatre autres compositions de Kindergarten, le groupe se plait à brouiller toujours plus les pistes, à rendre évident ce qui ne l’était pas forcément au départ et surtout à nous étonner encore et encore. Au premier rang de ces étonnements, Columbine’s Twin est une magnifique composition qui étale sans honte sa volonté de séduire et son haut pouvoir mélodique. On peut penser, avec ce thème serpentin voire moyen-oriental, aux soubresauts colemanien et klezmer d’un Masada, sauf qu’il y a cette partie centrale sur laquelle les quatre musiciens partent dans une toute autre direction et attisent toujours plus la flamme d'une musique débridée mais qui reste foutrement accrocheuse (et mention spéciale pour cette imitation plus vraie que nature des youyous matrimoniaux, aux alentours de 6’15). Surtout, d’une manière générale et par rapport à son prédécesseur, Kindergarten joue davantage sur la complémentarité entre les deux saxophones. Un petit jeu encore plus poussé, encore plus affiné et cela aurait été dommage de s’en priver lorsqu’on dispose d’un alto et d’un ténor dans le même groupe. Une optique particulièrement évidente sur le très beau More Friends mais également perceptible sur Sugar OD. Quant à Bain Atlas, ce titre passionné et brûlant résume assez bien la force de persuasion d’un groupe qui n’a pas besoin d’artifice musculeux pour nous faire chavirer définitivement. Aussi riche que varié, Kindergarten est donc une réussite totale. À noter également qu’il existe une version CD de ce disque et qu’elle a été publiée par BeCoq records.

Hazam (20/07/2014)