Le premier contact avec Delacave s'est fait un sale soir de novembre 2013. Un concert dans la grisaille et au fond d'un bar, avec un grand moment de rock'n'roll pour Noir Boy George, tour à tour en duo avec l'organisateur et la patronne du Terminus. Depuis, le Messin a pris sa revanche et Delacave a sorti son premier album.
Un nouveau duo issu des hauts-fourneaux de la Grande Triple Alliance Internationale de l'Est avec Lily Pourrie (chant et basse) et Seb Normal (Le Chômage, The Feeling of Love) aux machines/claviers/boite à rythmes/choeurs. Tu la sens l'odeur de faisandé ? Ils appellent ça gloomy wave ou glue wave c'est à dire une new-wave lugubre et collante, un truc où c'est pas la fête tous les jours, qui plombe tes élans d'optimisme, toi qui était prêt à relever le PIB de ton pays et guerroyer contre le gaspillage. Nappes synthétiques moroses, rythmes traînants, mélodies blêmissantes, The Way of Nothing, Funeral Party, It's too gloomy, titres à l'avenant, bienvenue sur une vague douloureuse. Mais il serait faux de voir dans la musique de Delacave qu'une corde pour se pendre. D'abord parce que ces mélodies ne sont pas que tristes mais dégagent un parfum envoûtant. Parce que Funeral Party est en fait le morceau le plus guilleret d'un album qui sait se montrer naïf et fringuant. Et que Delacave sait aussi envoyer des coups de pied dans les portes, se faire saillant avec une belle attaque de basse sur le mémorable Uniform with no brain, l'incisif Words are blocked ou Garbage, reprise enlevée de UV Race. Sous ses dehors de musique cheap, bricolée et chancelante, Run Straight To Them And Grunt, avec son titre en forme de profession de foi, regorge d'accroches et de forces sombres et souterraines, invocation lointaine des années 80, brillamment revues et corrigées à la manière de Jessica 93. Delacave au grand jour.

SKX (24/02/2014)