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Régis
Boulard
Après Tout
Self-released 2014
Je connaissais
la musique de Régis Boulard à travers ses différents
projets (Trunks
ou Chien
Vert) mais pas ses travaux en solitaire. Et il en a quelques-uns à
son actif que je découvre en même temps que Après
Tout. Mais le batteur Régis Boulard n'est jamais vraiment seul.
Que ce soit avec le violoniste Régis Huby en 2002 sur l'album Oui,
Mais ou en 2005 sur Streamer avec toute une ribambelle de musiciens
dont Noël Akchoté, Régis Boulard sait s'entourer des
personnes qui vont apporter leurs touches personnelles et magnifier ses
compositions.
Pour ce nouvel album, le guitariste Olivier Mellano l'accompagne sur cinq
des huit morceaux. Et dès I Brew, dès ce magma montant
et ce crépitement de rythmes, l'alchimie opère. Dès
ces couches de guitares et les divers effets vous faisant entendre des
cuivres comme des mirages auditifs et cette batterie free échafaudant
le chaos sans le déclarer, insufflant une lente montée d'adrénaline,
grave et belle, c'est se sentir dans des sables mouvants, accepter de
partir sur des chemins de traverses, se laisser envelopper dans une bulle
sonore qui va se révéler aussi introspective qu'agitée.
Preuve avec le deuxième titre, Still Drums, beaucoup plus
nerveux. Batterie palpitante, aérienne, un touché virevoltant
sans la démonstration qui va avec, tout en élégance,
avec ce riff de guitare se répétant inlassablement et rajoutant
de la tension dans l'air. Avec Dehors, Régis Boulard continue
de n'en faire qu'à sa tête et se met à la voix avec
une chinoiserie, du tordu ludique et anguleux que ne renierait pas un
Père Ubu. Mais ça doit être le delirium qui me monte
au ciboulot. Ne pas être là où on l'attend, surprendre,
se faire plaisir, mêler la gravité et le récréatif.
Il est donc capable de passer des neufs minutes solennelles et splendides
de Mon Trottoir reprenant le fil invisible de I Brew aux
dix minutes improbables de Tu As Vu. Une composition très
étrange, égrenant gentiment sa mélodie à la
guitare avant que le chant en boucle qui fait bom-bom-ka façon
human beat-box ne prenne définitivement les devants, seulement
accompagné par un clappement de mains (à moins que ce soit
le rythme ultra basique d'une boite fatiguée) pendant sept longues
minutes, amusantes au début mais rapidement incongrues et cassant
la dynamique de l'album. Puis, c'est retour à la normale avec Heavy
Rain, No Cloud, normalité chez Régis Boulard rimant
avec singularité, sensibilité et habileté pour un
titre une nouvelle fois tout en pointillé et en finesse. Et comme
ce disque se nomme Après Tout, le pendant de tout est permis,
le disque finit par I Saved The World Today, une reprise de Eurythmics
qui lui va comme un gant, coulé magnifiquement dans son univers
et un batteur qu'on découvre chanteur-crooner.
Après Tout le bien nommé, se nourrissant de ses projets
Trunks ou Chien Vert, disque intemporel et hors-mode, libre d'aller là
où il veut et unique au final. C'est pas tous les jours qu'on en
rencontre des comme ça et il mériterait amplement une sortie
autre que uniquement digital pour l'instant, afin que la trace soit encore
plus palpable et le plaisir plus grand.
SKX (24/03/2014)
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