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Blind Thorns
s/t – LP
Cheap Satanism/New Atlantis/Offset/Tandori 2014

Blind Thorns est un projet parallèle monté par les petits gars d’Ahleuchatistas : aux côtés du batteur Ryan Oslance et du guitariste Shane Parish – anciennement Shane Perlowin mais il a souhaité changer de nom pour prendre, si j’ai bien tout suivi, celui de sa grand-mère adorée –, on découvre donc ce chanteur/vocaliste/vociférateur, Antoine Läng, un bonhomme quasiment inconnu des services de renseignements de Perte & Fracas. Mais, précisons quand même, pour situer un peu, que ce Suisse a dans le passé enregistré pour Léo records un disque en compagnie du percussionniste Rodolphe Loubatière et qu’il est également membre d’IMO – Insub Meta Orchestra –, un collectif à géométrie variable d’une cinquantaine de musiciens et dédié à l’improvisation ; Läng utilise également des dispositifs électroniques pour modifier son « chant » et il se définit comme un performer ayant une approche contemporaine voire acousmatique de la voix. Vous voyez le genre ? Non ? Pourtant, moi, je vois très bien. Et en plus j’aime ça.
J’aime ça, même si le rire inaugural qui ouvre la première face du disque me parait un rien forcé… Ouch ! ai-je d’abord eu envie de dire, échaudé par le risque d’avoir à supporter un onomatopéteur un peu trop envahissant. Mais il n’en est rien. Les parties vocales d’Antoine Läng ne prennent pas toute la place ou plutôt – et il me semble que c’était le but au départ – la voix joue ici le rôle d’un troisième instrument. Un instrument qui ne raconte rien de précis mais qui pose ses ambiances et ses uppercuts tout comme la guitare de Parish et la batterie d’Oslance tentent de tisser des trames. Des « trames » parce qu’on ne peut pas parler non plus de compositions : ici l’improvisation est reine et ces enregistrements sentent l’urgence d’une rencontre plus ou moins brève.
Là est en fait le problème du disque : la plupart du temps Ryan Oslance se contente de marteler des rythmes tribaux et répétitifs, ne laissant à Shane Parish que trop peu d’opportunités de faire preuve de ses (immenses) talents de guitariste. C’est donc Antoine Läng qui, comparativement, s’en tire presque le mieux. Sauf lorsque Blind Thorns passe en mode semi-atmosphérique sur A Railway Diversion, titre qui voit le couple Parish/Oslance fonctionner à plein régime et offrir un magnifique écrin aux élucubrations vocales de Läng. La deuxième face du disque est elle occupée par une seule plage qui fort heureusement module encore davantage le rôle de chaque force en présence : Gambling With The Wrong Dice est une longue pièce de quelques vingt minutes et Läng se fond totalement dans la masse sonore voire s’éclipse un instant pendant ce qui constitue l’un des meilleurs passages du disque – avec cet égrenage de notes si typique de la part de Parish… Le vocaliste reprend ensuite les rênes lorsque ses halètements puis ses sifflements apparaissent, avant un final où les pulsations rythmiques prennent enfin sens et accompagnent ses lointains hurlements de bête en cage ainsi que les triturations de la guitare. Dommage que tout le disque ne soit pas à l’image de ce Gambling With The Wrong Dice, à la fois plus défini – plus maîtrisé – et plus fulgurant.

Hazam (07/10/2014)