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Whore Paint
Swallow My Bones – LP
Load 2013

Whore Paint, trio entièrement féminin de Providence, nous offre un bel os à ronger avec leur premier album Swallow My Bones. Le single Menarchy était un très bel amuse-gueule. Le plat de résistance est servi sur un plateau de chardons ardents. Il n'a pas été facile à aborder. Malgré ces lèvres pulpeuses, l'abord général est froid, dépouillé, cassant, abstrait, le chant déconcertant, un caractère indocile qui demande un peu de temps avant de le comprendre et le dompter. Une guitare, une batterie, un chant, trois instruments faisant souffler des vents contradictoires. Quand la guitare et la batterie enclenchent en même temps, c'est une pluie de gros grêlons s'abattant sur vos frêles épaules. Dans la minute suivante, Whore Paint louvoie, murmure son noise-rock, se tapit dans l'ombre, opte pour des chemins quasi lyriques avant de revenir sauvage, baston no-wave démultipliant la force d'un noise-rock tour à tour narratif ou explosif. I'd Eat My Bones joue ainsi la carte du minimalisme, duo chant-batterie tout sec avant que la guitare ne mette peu à peu son grain de sel et n'explose la compo à intervalles réguliers alors que Dead Like I Was en fin d'album emprunte aussi des contours décharnés, répétitifs et narratifs prenant toute son ampleur sur la longueur (plus de six minutes pour ces deux compos).
Ce qui ressort de la musique de Whore Paint, c'est surtout une grosse personnalité. Entre les phrasés originales de la guitariste Hilary Jones (joue aussi dans Arcing), la recherche rythmique de Meredith Stern et le chant de Rebecca Mitchell, l'ex-Made in Mexico, l'osmose Whore Paint est unique. Des compositions possédant leurs propres mécaniques et propres humeurs, leurs riffs ingénieux, une imbrication entre les trois instruments sur le fil du rasoir ou filant main dans la main, dessinant des courbes cassantes et vibrantes, des morceaux virulents et cinglants l'air se dévoilant peu à peu pour devenir définitivement redoutables. Et puis ce chant qui joue beaucoup dans la singularité de Whore Paint. Une voix très présente mais pas envahissante, forte, sentencieuse ou veloutée et mélodique, toute une palette d'émotions qui fait du chant un véritable instrument à part entière, déclamant des paroles engagées pour un groupe qui se déclare ouvertement féministe. Un album menaçant, perturbant et qui vaut vraiment le coup de s'y plonger.

SKX (27/10/2013)