inmybedmusic
|
Embedded
An Inmybed Compilation LP
In My Bed 2013
Le label
rennais In My Bed nous embarque dans une compilation faite avec amour.
Le mot embarque n'a pas été choisi au hasard car
du haut de mon encyclopédique savoir, point ne savais-je ce que
Embedded signifiait. En quelques clics, la traduction donnait les
termes embarqué, incorporé ou incrusté
et non pas enfoncé au fond de son lit comme une grosse larve
ainsi que je l'avais initialement crû. Mais embedded se dit
aussi pour les journalistes à la solde d'une armée qui les
embarquent avec elle pour tresser des lauriers à la grandeur de
son action. Ce qui ne sera absolument pas le cas avec ce présent
zine puisque l'objectivité est une qualité passant avant
la famille et la patrie et que franchement, pas besoin de se forcer pour
aimer cette compilation.
D'ailleurs, à aucun moment l'impression d'être confronté
à une banale compilation disparate et à lintérêt
fluctuant selon le défilement des pistes n'assaille mes petits
sens. 13 groupes différents ont beau se présenter sur le
vinyle, Embedded s'écoute comme un album à part entière.
13 groupes bien distincts mais avec une unité de ton surprenante
et qui ont sorti le grand jeu pour offrir de l'inédit supérieur
ne rimant pas avec fond de tiroir dont on se débarrasse négligemment
pour une vulgaire compile. Vas-y, bouffe. Non, Embedded glisse
tout seul, ça senchaîne comme dans un rêve moite
et charnel, le grand chelem comme dans les désirs les plus fous
qu'un supporter du stade rennais ne connaîtra jamais (pour ça,
il eut fallu que cette compilation sorte à Nantes).
Une homogénéité due au fait que chacun des treize
morceaux a été enregistré dans le même studio,
par la même personne et dans des conditions similaires, chaque groupe
se présentant sur une seule journée chronométrée
de main de maître par les sbires de In My Bed. Et le fait également
qu'ils sont tous de Rennes, que nombre de ces groupes sont largement incestueux
et présentent un univers indé/pop/années 90 en commun.
Formica, le groupe des proprios du label, se taille la part du lion. En
plus d'un True/Wrong décontracté et de belle facture
ouvrant le disque, on retrouve un des membres de Formica dans Mozzarrela's
Funeral Project, projet solo servant à recycler toutes ses compos
dont Formica n'a pas voulu. A écouter son Lose is the rule
(une profession de foi !) pétaradant, ils vont faire un peu plus
gaffe la prochaine fois avant de lui dire non. Chatterbox comprend également
un membre de Formica, associé à une chanteuse/claviériste.
The Walk est leur tout premier enregistrement et pour en parler,
il faut reprendre le texte de In My Bed pour un tract de concert : Chatterbox
c'est comme les Vaselines mais en plus sec. Je ne peux que m'incliner
devant cette description éclairée et pleine d'une sagesse
malouine. La voix féminine est grave et sobre, le morceau est délicieusement
traînant et dépouillé, la guitare dérape tranquillement
et The Walk a un goût de trop peu. Avec Lonely Tunes ou Prosperi
Buri, on reste aussi en famille avec la branche des cousins. Lonely
Tunes est le seul groupe basé à Paris mais son origine sent
la galette-saucisse. Là encore, c'est du premier enregistrement
et Winter Comes a cette nonchalance classe, la rythmique est originale
et entre les Pastels et Pavement, mon cur balance. Quant à
Prosperi Buri, la nonchalance est une seconde peau alors si en plus, ils
appellent leur morceau Smoked, vous imaginez le résultat.
Finement fumeux.
Après, vous avez les groupes augmentant le degré des saturations.
13th Hole (le sixième album sort bientôt !) et Downtown Cuckoo,
tendance post-punk noisy pour deux titres tendus, mélodiques et
qui font leur effet. Laetitia Sheriff se fend d'un superbe titre nerveux
et envoûtant, Big Sur, avec Régis Boulard à
la batterie pour un titre qui n'aurait pas dépareiller sur Trunks,
leur projet commun. Moller-Plesset accouche de My Job, morceau
qu'ils ont souvent joué en concert (c'est à dire pas très
souvent vu le nombre de fois qu'ils en font). La chaleur monte d'un bon
cran pour un morceau tout en urgence grandissante et un travail guitares/batterie
qui rend fou alors que le chant rend aveugle.
On reprend son souffle avec Santa
Cruz et une petite Beatles-rie biberonnée à l'Americana
nommée Sad and Lonely. Du très bel ouvrage fondant
en bouche.
Et on finit avec les découvertes. Mistress Bomb H n'en est pas
une pourtant mais pour se mettre au goût de la compilation, la Mistress
a abandonné l'electro-vitriol de son dernier album,
a retrouvé sa basse, a invité deux Moller-Plesset et son
Money Shit devient une parfaite surprise, surtout quand c'est agréable.
Toujours aussi tordu, structure cyclique et répétitive,
voix posée comme une empêcheuse de tourner en rond dans un
monde académique, j'aurais presque envie de leur crier à
ces trois là de continuer de faire quelquechose ensemble ! Sudden
Death of Stars étaient de parfaits inconnus avant que j'entende
leur The Break Up. Sept personnes dans un trip rock-pop-sixties-psychédélique
avec tambourin. Ça fait peur dit comme ça mais à
l'image de tous les autres compos de ce disque, ça ne semble pas
votre tasse de thé et pourtant, ce titre est encore curieusement
une réussite, file droit sur l'autoroute du soleil et se fredonne
en boucle. Je garde presque le meilleur pour la fin avec Saïtam.
Jamais entendu parlé alors que je connait ce gars depuis 20 ans
! Saïtam, c'est Mathias à l'envers, jouant également
dans We
Only Said pour un projet solo à la base mais qui se fait accompagner
sur The Things of Life par, entre autres, le batteur de For Damage.
Un album sorti dans la plus grande des grandes confidences en 2011 (Facteur
Seul) mais ce morceau de la compile semble au-dessus du lot, possédant
un envoûtement supérieur, une construction allant crescendo
dans l'adrénaline tout en gardant une classe folle, un morceau
très simple tout en étant très chiadé.
Pochette référencée et signée Nine Antico,
un texte de Philippe Dumez en français (et traduit en anglais)
expliquant le pourquoi du comment de la pertinence d'une compilation en
2013. Mais plutôt qu'un long discours, il suffit d'écouter
ce disque pour s'en rendre compte. Embedded rend ces lettres de
noblesse au monde de la compilation tout en offrant son lot de découvertes
et de bonne musique,
tout simplement.
SKX (23/10/2013)
|
|