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vitesse


Ventura
Ultima Necat - CD
Africantape/Vitesse 2013

Une petite phrase en gris, après l'interminable liste de remerciements, a attiré l'attention. This album was recorded with a self-centered, depressive philosophy.
Ventura n'a jamais été réputé par sa joie de vivre et ses morceaux de comiques troupiers. N'empêche, Ventura est monté d'un bon cran dans la déprime. Et quand en plus, un groupe vous sert un titre en latin, c'est vraiment que rien ne va plus. Ultima Necat, écho à Pa Capona, qui, espérons, ne signe pas la dernière heure de Ventura.
Un troisième album n'alignant plus des perles immédiatement évidentes comme With Ifs ou Twenty Four Thousand People sur le précédent We Recruit, n'ayant pas la dynamique qui va de l'avant. L'atmosphère se fait plus pesante, le pas est lourd et à l'abattement. Si la première écoute a été amère, mon petit doigt me dit que Ultima Necat finira par accrocher durablement. D'ailleurs, il accroche déjà. De plus en plus même. Ça devient collant.
La guitare, les couches et surcouches de guitares, Ventura ne s'en cache pas (Lots of overdubs and tricks précisent-ils). Ça vous enveloppe, réchauffe la couenne d'une mélancolie possessive, fait basculer Ventura dans une aura noisy-pop athlétique. Car Serge Morattel est toujours à l'enregistrement et leur a taillé un son qui est pour beaucoup dans la réussite de cet album. Contraste saisissant entre un son aussi vaporeux que colossal, un chaud et froid entre guitares brouillardeuses et riffs de mammouths, dichotomie entre la pâleur du chant qui semble sans cesse à bout de souffle, abattu et la rythmique lourde, appuyée, soulignant encore plus le malaise de la voix qui en devient émouvante. Un disque puissamment aérien, clarté de chaque instrument sonnant comme cent, grosse masse sombre au-dessus de la tête d'où jaillit une lumière maladive. Ça ne colle plus, ça pénètre en profondeur.
Et comme Ventura excelle toujours dans l'art de torcher des compositions finement montées aux mélodies prenantes, Ultima Necat n'est pas une enveloppe au contenu stérile. Nothing Else Mattered est le titre le plus évident mais loin d'être le plus inoubliable. Little Wolf, Intruder, Corinne et ses She can't swim renvoyant au Seasick de Jesus Lizard et surtout, le gigantesque Amputee. Onze minutes qui m'ont directement fait penser aux oubliés et inestimables anglais de Venus Beads avec ce sens de la mélodie poignante, de la construction épique, quasi lyrique et éminemment troublante. Tu peux pigner, on t'en voudra pas. Ou te moquer, on comprendra aussi. Mais là, j'ai mon morceau pour l'hiver. Le reste est secondaire. Même le titre final, Exquisite & Subtle, qui vire shoegaze et insipide dans la dernière ligne droite.
Le trio suisse a réussi à garder son identité tout en proposant une nouvelle donne, un nouvel élan, même plombé et animé de sombres sentiments, de son approche indie-rock et, ultime preuve de son talent, a fait masteriser son album au Golden Mastering à… Ventura, Californie. La classe sur toute la ligne.

SKX (18/03/2013)