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Les Yeux de la Tête
Mosca Violenta - CD
Head, Rude Awakening, Baboon Fish Label 2013


Trio rock instrumental depuis 1998. Voilà comment se définit lui-même le trio caennais. C'est simple, efficace, sans ambiguïté alors que franchement, il pourrait avoir quelques doutes. Basse, batterie, saxophone, ce n'est pas le trio rock de base. La tentation pourrait être grande d'ajouter des étiquettes comme jazz, free, improvisation, noise ou, plus horrible, jazzcore, comme pour les Italiens de Zu, comparaison revenant souvent quand il faut s'escrimer à décrire Les Yeux de la Tête qui envoie tout ça valdinguer vite fait bien fait. Les Yeux de la Tête vous ouvre la vue sur un rock généreux ne s'embarrassant pas d'œillère pour limiter son champ d'action. Un rock à l'énergie, allant, véhément, des coups qui font mal et de la pommade pour que ça passe tout seul.
Mosca Violenta est donc dans la continuité de Nerf. Sauf que les compositions sont encore plus enlevées et prenantes à l'image de toute la face A (pour les heureux possesseurs du vinyle), soit quatre titres inspirés et bluffants. Le socle rythmique ouvre les poumons. La basse distordue ferait le bonheur de nombreux groupes noise-rock made in Chicago. Le dialogue est de haut vol sans jamais en rajouter, et c'est ce qui est appréciable avec cette paire basse-batterie. Des mains de velours dans un gant de fer, la finesse sous la dureté apparente, les angles transcendés par un groove incomparable, des envolées tout en souplesse, passant sans difficulté d'un passage lent et lourd (le somptueux Sloomer) à plus d'agilité.
Et pour embellir tout ça ou rajouter une couche de folie, mettre de l'huile dans les rouages ou sur le feu, le saxophone insère ses lignes mélodiques, qu'elles soient empruntes de gravité ou virevoltantes, s'intercale dans l'espace que la paire rythmique laisse volontiers vacant. Car l'air n'est jamais étouffant chez Les Yeux de la Tête dont les oreilles sont bien dégagées. Juste chargé en globules harmonieuses et impétueuses. Le saxo est donc à l'image de la basse-batterie, n'outrepasse pas ses droits, reste dans les clous instaurés par une section rythmique instigatrice du plan de bataille ou pousse au cul pour léviter encore plus haut et éclairer la rugosité. Et quand tout ce petit monde s'autorise quelques embardées free, le trio retrouve rapidement sa force collective, chacun à l'écoute de l'autre et avançant tous dans une direction identique, celle d'un troisième album remarquable.
Les Yeux de la Tête n'est pas prêt de nous sortir par les trous de nez. Sauf qu'il devrait prochainement changer de nom et opter pour Mosca Violenta afin d'éviter un amalgame devenu effectivement très gênant.

SKX (19/09/2013)