letrangleuse
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L'Étrangleuse
s/t - LP
Les Disques de Plomb 2012

Quand la musique classique et le rock se rencontrent, quand la féerie d'une harpe et l'électricité d'une guitare se jaugent, quand deux mondes différents n'avaient à priori pas à se rencontrer, cela donne L'Étrangleuse. Une histoire de cordes, très nombreuses, emmêlées, préparées, altières, nerveuses, lumineuses, intimistes et jamais asphyxiantes. Une histoire à se pendre mais devenue réalité grâce à Mélanie Virot (harpe) et Maël Salètes (guitares), les deux donnant aussi de la voix (surtout le guitariste). Une harpiste plus habituée à fréquenter les salons feutrés et le monde du classique et un guitariste coutumier des scènes obscures et des amplifications au sein de la troupe de L'Orchestre Tout Puissant Marcel Duchamp.
Rencontre du hasard débouchant sur un heureux mariage. Ouverture bilatérale et remise en cause personnelle pour une musique forcément singulière. Ce premier disque étudie toutes les possibilités (dont le maximum est loin d'être atteint), sans limite, sans orientation précise, liberté totale et disque éclectique au final mais sans impression d'éparpillement. Compos reliées entre elles par un fil invisible fait de poésie et de velouté, de profondeur et de simplicité, d'approche mélodique, d'abstraction et de touches impressionnistes, avec comme moteur perpétuel, l'envie d'explorer.
L'Étrangleuse met en boucles ses guitares, pince avec virtuosité un tas de cordes se mélangeant habilement, joue sobrement avec des pédales d'effets et s'épanche dans le folklore épuré, la ritournelle aigre-douce, un instrumental romanesque pour emballer la princesse (le titre d'ouverture sans nom), des airs faussement médiévaux, du post-rock cristallin, de l'acoustique fondu dans l'électrique et de la reprise avec Kasyak Lubvie, morceau de Leonid Soybelman au sein de Kletka Red. Ça peut faire peur mais vous auriez tort. L'Étrangleuse le fait avec élégance et brio.
Ne se refusant vraiment rien, le duo ne s'est pas contenté de la configuration harpe/guitare. Il enrichit sa musique avec des samples (Television), les percussions de Aymeric Krol pour un parfum d'Afrique, d'autres gadgets sonores non-identifiés et invite G.W. Sok (Cannibales et Vahinés, n'ayant pas encore perdu son préfixe de "Ex" The Ex) sur le plus énervé Writer's Blog. Avec le vinyle, un coupon de téléchargement à l'intérieur pour deux morceaux supplémentaires. Dear ressemblant à un morceau de The Ex quand ils reviennent d'Ethiopie et Collision Time avec des sons trafiqués et une ambiance electro dont l'aura m'avait déjà frappé pendant leur récent concert.
L'Étrangleuse réussit à faire apprécier de la harpe à des noiseux, ce qui n'est pas une mince gageure et nous faire sentir toute chose avec des morceaux qui ne sont pas inoubliables, mais décrivant une musique originale et onirique. Ce qui ne peut foncièrement pas faire de mal.

SKX (03/04/2013)