bailterspace
fire

Bailterspace
Trinine - LP
Fire 2013

Bailterspace a donc décidé de s'y remettre pour de vrai. Après un Strobosphere qui avait mis fin à quatorze années de silence, les trois néo-zélandais qui passent leur vie à New-York enchaînent avec Trinine. Ils ont tellement retrouvé l'envie que même John Halvorsen, le bassiste d'origine, est finalement revenu à son poste après avoir décliné l'offre sur le précédent album. Le trio historique qui a fait monts et merveilles depuis les Gordons est-il encore capable d'étincelles après un Strobosphere mi-figue mi raisin (un comble pour un groupe kiwi), de retrouver la flamme d'une jeunesse révolue, d'appliquer l'ancienne recette qui a fait ses preuves sans nous rabâcher les oreilles ? Hé bien... j'en sais fichtre rien parce que tout ce que vous venez de lire, vous pouvez l'oublier. On rembobine l'histoire et on inverse tout. Trinine a été en fait enregistré avant Strobosphere, Halvorsen se serait cassé depuis et l'album du vrai retour, c'est donc Trinine !
Un Trinine beaucoup plus en filiation directe avec leur glorieux passé et le son qui les caractérise. Ce shoegaze qui rabat le caquet des Anglais regardant le bout de leurs pompes alors que Bailterspace vous regarde droit dans les yeux, et même bien au-dessus, vers une ligne d'horizon où plane le mystère des groupes néo-zélandais, où on ne confond pas insipide et envoûtement, gratouillage stérile et brumes enveloppantes. Trinine est un album plus sombre et atmosphérique que son prédécesseur, pardon son album suivant. Sur une rythmique toujours aussi robotique, propulsante et solide, Alister Parker tisse avec sa guitare un brouillard épais, de l'espace dans lequel se perdre, une texture incertaine, des formes fantomatiques, un bruit qui ne manque jamais de force et de consistance, un fin wall of noise dont il a le secret. L'hypnose des grands fonds. Les mélodies sont délayées et brillent sous la grisaille, Parker chante mieux que sur Strobosphere, la reverb renvoie un écho mélancolique et le charme opère plus d'une fois. Des lignes de basse qui vibrent, graves et entraînantes, des attaques rythmiques se répercutant en boucle pour une transe des Antipodes, des motifs répétitifs agissant par vagues contre lesquelles il est bon de se fracasser, de ne pas résister et se laisser emporter dans une fausse monotonie et un bel élan de perdition.
Le trio n'a en fait jamais cessé de faire la même musique depuis The Gordons, suivre une esthétique musicale identique tout en apportant de légères nuances. Stupéfiant de les retrouver toujours aussi en forme plus de vingt ans après, d'avoir su conserver cette petite flamme intérieure. Le groupe signe donc un très beau retour et c'est maintenant qu'on est inquiet sur l'avenir du groupe avec le trio magique qui n'est plus constitué et un Strobosphere se révélant au final un bon ton en-dessous.

SKX (14/11/2013)