lunatictoys
carton
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Lunatic
Toys
Briciola - CD
Carton 2012
Il est beau
cet album. Il a mis du temps à se décanter, comme tous les
disques ne se laissant pas apprivoiser facilement, ces objets non-identifiables
jouant à sauter sur les ponts musicaux, sans jamais y laisser traîner
plus d'un orteil, pour mieux les rassembler au final, les ponts et les
orteils. Une marque de fabrique de Carton, label qui avait déjà
fait le coup
avec OK, Linnake ou Irène. Des groupes qu'on pense issus de la
sphère jazz mais vous glissant entre les pattes et dans le genre,
Lunatic Toys est un beau spécimen.
Le jazz et ses composants sont certainement la cheville ouvrière
du trio lyonnais mais, à la manière des groupes de Rude
Awakening, Q
en tête, Lunatic Toys transcende largement le style. Un saxophoniste
alto, un batteur, une claviériste et vogue le spectaculaire.
Des terminaisons nerveuses vous secouant dans tous les sens à de
l'introspectif planant au-dessus des foules laborieuses, du ludique rimant
avec lunati(c)que comme le branque All in et son atmosphère
de jeux vidéos azimutée dans une course poursuite de l'espace,
des accroches pop et des harmonies parfaites, de l'euphorie, une légère
aura electro avec les sonorités d'un synthé cheap coincé
tout près de l'imposant piano Fender Rhodes et ses belles touches
rondes ou rythmiques, des mélodies plus profondes, de la gravité,
une énergie punk et Briciola n'est pas de la petite bricole
mais vers des paysages bariolés et expressifs s'envole.
Lunatic Toys construit, détruit, planifie, se liquéfie,
vous mène en bateau dans des structures aussi absorbantes que limpides.
On ne voit rien, on ne comprend rien, on se laisse porter par les lignes
d'un saxophoniste autant accaparé par l'ardeur et la texture sonore
qu'il peut tirer de son instrument que par les mélodies délectables
et toujours évidentes. Se laisser rouer de coups par les roulements
et l'énergie d'un batteur qui ne fait jamais dans le démonstratif
mais assène de véritables fulgurances, une tension continue,
du concret pour mieux se laisser bercer par les sonorités enveloppantes
du clavier lors de Mô, final presque apaisant dont on ne
sait si il vous ramène sur terre ou rajoute une strate dans les
hauteurs vers lesquelles Lunatic Toys vous a emmené.
Un dialogue à trois dans un vaste champ inventif et cohérent,
d'une conversation révélant peu à peu son sens tout
en conservant largement sa part d'ombres et de mystères. C'est
ainsi que sont faits les albums qui durent.
SKX (10/07/2012)
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