kimphuc
ironlung


Kim Phuc
Copsucker - LP
Iron Lung 2011

Après deux singles en 2008 et un autre en 2009, on avait perdu la trace de Kim Phuc. Parts Unknown records aurait dû sortir l'album en 2010 mais le label semble avoir passé l'arme à gauche. On pensait bien que la même chose était arrivée au groupe de Pittsburgh. Un groupe en dilettante, une belle brochette de losers s'auto-flagellant en se traitant de retarded band, remerciant les cinq pelés prétendant faire attention à eux quand ils jouent mais qui, après un mariage, un divorce, un label qui se défile, une maladie du pancréas du chanteur Rob Henry (les photos ci-dessous sont éloquentes), Kim Phuc le sort enfin ce damné premier album.
Enregistré par Jason Jouver (ex-Jumbo, Creta Bourzia et dans l'actuelle formation de Don Caballero), Copsucker a ressorti les trois morceaux phares de ces trois singles, ce qui n'est aucunement gênant pour les winners comme ma pomme qui les avaient déjà puisque les versions sont nouvelles. Des riffs accélérés sur Prostitute, des versions de Weird Skies et Wormwoodstar semblant plus dynamiques sur les singles et autres menus broutilles que je vous laisse juger par vous-même si le cœur et votre disque dur vous en dit. Les trois singles en 320 ko, face B comprises, sont à votre disposition (de rien).
Trois morceaux qui restent les meilleurs de Copsucker. Ca pourrait ne pas être bon signe. Mais en même temps, il n'y en a pas de mauvais. C'est ça la touche Kim Phuc. Un album homogène, une musique qui ne paye pas de mine mais qui décalamine, pétaradant en toute simplicité. Sur la longueur d'un album, les compos n'ont pas le même impact. L'urgence suinte moins à chaque sillon, diluée dans une suite de titres mis bout à bout et manquant de relief au lieu d'une suite de compos pensée comme un véritable album avec des contrastes, des mouvements, des surprises. Alors ça peut paraître terne au début mais la force de chaque titre fini par s'imposer. Le punk-rock-noisy de Kim Phuc n'est pas glamour. A l'image de cette banale pochette ou de ce poster à l'intérieur n'apportant aucune plus-value, on peut très bien passer à coté de la musique de Kim Phuc. Si vous aimez que ça aille toujours plus vite, plus fort, plus original, plus moderne, que ça vous en mette plein la vue pour (vous donner l'illusion de) vous impressionner, vous pouvez passer votre chemin. Il y a du Hot Snakes en moins rock'n'roll et plus sombre, du Stooges mais avec un traitement hardcore dans les structures, un groupe qui pourrait aussi bien jouer avec des groupes indies qu'avec les Germs et toute la scène hardcore du début des années 80. Un groupe hybride qui s'en remet à son seul talent pour écrire des chansons furieusement attachantes. Un chanteur au mieux de sa forme qui a perdu des kilos mais pas sa voix percutante et reconnaissable entre mille, jouissant d'une belle réputation et d'un beau charisme sur scène. Les morceaux hors-singles finissent par vous captiver. Le plan de guitare très court à la fin du double morceau enchaîné Animal Mother / Local Round-up est le genre de détail qui relève le niveau et pour celui qui n'écoute pas ce disque en pantoufle, Copsucker regorge de petites accroches qui font les disques que vous chérissez presque déraisonnablement.
Car tout ce qui fait le charme de Kim Phuc, c'est qu'il ne suit aucune mode, aucune escalade en essayant de péter plus haut que son fondement, vous faire croire qu'il a LA solution. Kim Phuc est conscient de ses limites, opte pour l'attitude après moi le déluge, mais met tout son cœur, sa candeur et sa foi dans onze titres directs et souverains.
Comme tous les autres groupes de la ville au début des années 90 - dans un genre différent - les Swob, Blunderbuss (avec qui ils partagent pas mal de points communs), Shale ou Six Horse, Kim Phuc capte en vous une fibre toute personnelle et mystérieuse, le genre de groupes qui n'ont rien d'exceptionnel, sans artifice, hors du temps mais que vous aurez toujours autant de plaisir à écouter dans vingt ans.

SKX (30/04/2012)



Rob Henry avant...

... après

+ Ben Smartnick et Eli Kasan (guitares), Corey Lyons (basse) et Tom Payne (batterie).