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Drive With A Dead Girl
Hotel's California - CD
Lineaments 2012

Appeler son disque du même nom (à une apostrophe s près) d'un des pires morceaux de l'histoire de la musique est une monstrueuse gageure quand on sait que ce groupe lillois est à l'extrême opposé en terme d'esthétisme musical. Et pour tout le reste aussi. On avait déjà été séduit par un précédent album bancal, mais un des deux guitaristes a tout de même bien pris soin de préciser cette fois-ci que la production était toujours aussi (volontairement) minimaliste et que le son craque de partout. A vrai dire, ce nouvel enregistrement ne m'a pas offusqué. C'est le contraire qui aurait été bizarre. Un Drive With A Dead Girl avec un gros son nickel, ça serait comme une batterie sonnant comme une casserole chez Albini ou Mike Patton n'en faisant pas des tonnes, une incongruité de Mère Nature. Malgré une résidence tout luxe à L'Aéronef de Lille durant laquelle le groupe en a profité pour enregistrer leur sixième album, Drive With A Dead Girl a mis un point d'honneur à ne rien changer à leur château branlant. Ça grésille, ça sonne rêche ou parfois petit joueur, ça manque de coffre, c'est cotonneux ou soudainement brutal, c'est enregistré live avec toutes les imperfections qui vont avec, chaque compo est loin d'être inoubliable mais il faut aborder cet album comme un tout, comme un voyage sonore entre décharges noisy et atmosphères cold ou vaporeuses, un puzzle représenté par neuf titres comme autant de pièces s'imbriquant les unes dans les autres. Je ne suis pas sûr de comprendre le tableau final mais les sensations sont agréables.
Je n'avais pas envie de vous faire le coup de la musique parfaite pour la bande-son d'un film, ce genre de clichés pour chroniqueurs fainéants, parce que déjà, Drive With A Dead Girl n'est pas un groupe instrumental et la voix et cris d'Alexia sont troublants, un instrument à part. Mais les vidéos mis en ligne pour les titres Khyber, Gamma et Animals intégralement tirées d'obscurs films poussent à aller de ce coté, collant assez bien à l'univers étrange et irréel du groupe. Mais le plus étrange, c'est le morceau qui a donné son nom à l'album et qui ne sera jamais un tube à faire bronzer sous le soleil californien. Un cauchemar de onze minutes de grouillements, de sirènes traînantes, de brume dissonante, de modulations fantomatiques, de stridences inquiétantes et d'un silence pesant. Ca fait du bien d'entendre ce genre de groupe, là sans être là, à mille lieux des canons de la beauté normalisée, préférant suivre la petite musique interne qu'il a dans sa drôle de caboche, quitte à laisser perplexe.

SKX (30/09/2012)