chaussetrappe
kythibong

Chausse Trappe
420m3 37'14'' - LP
Kythibong 2011

Ce disque a tout pour se faire détester. Des morceaux longs comme une nuit polaire sans moufles, désespérément interminables, répétitifs - le mot est faible - à se faire pâmer d'envie n'importe quel barbu de chez Skull Defekts. Trois titres seulement pour 37 minutes et 14 secondes, comme le suggère sans doute le titre, je n'ai pas mon chrono en main. Soit 420… mètre cubes ? d'une bonne grosse dose énorme d'ennui ? Un monstrueux bloc monolithique contre lequel se fracasse une prise de tête abyssale ? Rengaine les flingues.
Chausse Trappe a refermé le piège. Impensable. J'avais beau être aux aguets, je n'ai rien vu venir. Le travail de sape a fini par payer. L'hypnose des grands fonds. De la prestidigitation sonique. Enfermé, sans issue, vaincu par leur mantra d'autistes. Un quatuor gravitant autour de Nantes. Instrumental uniquement comme vous pouvez vous en douter. Une batterie, guitare-basse et un violon pour la touche d'originalité. Une mise en place montant graduellement en intensité, une adrénaline piquée au vif par les sonorités d'un violon bourdonnant, aux vertus narcotiques. Une rythmique à l'infini finissant par vous faire croire à des mirages auditifs. Une guitare se confondant avec le violon, grimpant dans la stridence, accentuant la pression. Un couple basse-batterie énorme sur le premier morceau (Part I) de la face A sur lequel s'écorche un long larsen modulé et plaintif, un grouillement de sons pointus, sifflants et de subtils décalages pour faire évoluer la bête vers toujours plus de pression, coup de butoir passant presque inaperçu, fondu dans la masse. Même tout le morceau de la face B, soit dix-huit minutes d'angoisse devant le vide qui se présente, s'en sort bien. Rien de trop long, rien qui dépasse, rien qu'une miraculeuse célébration des Dieux du rythme et du bruit, un rituel tout en sobriété et en gravité à l'assaut de la montagne.
Ne me demandez pas comment ça tient, ne me demandez pas comment ça se supporte, mais le fait est là, Chausse Trappe fonctionne. Un traquenard perfide qui s'écoute fort, très fort, à l'enregistrement parfait dans la précision et sûrement encore meilleur en concert. Entre le kraut-rock et le post-rock, Chausse Trappe se faufile et avec sa belle pochette sérigraphiée qui pète de mille feux, Chausse Trappe a bien trompé son monde et ne compte plus ses proies.

SKX (24/04/2012)