colinstetson
constellation
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Colin
Stetson
New History Warfare Vol.2 : Judges - LP
Those Who Didn't Run/The
End of your Suffering
- 10''
Constellation
2011
Etes-vous
prêts à écouter un disque de solo de saxophone ? Oui,
un disque entier. Si ça vous branche autant que d'assister à
un congrès UMP, je vous comprends. Et pourtant, vous auriez tort.
Non pas d'aller saluer nos amis de droite mais d'écouter ce disque.
Colin Stetson est un saxophoniste américain, installé à
Montréal et qui vous fait croire que c'est tout un groupe alors
qu'il est un groupe à lui tout seul.
Sur la pochette, il est précisé no overdubs, no looping
et utilisation de vingt-quatre positions différentes pour les micros.
On peut en effet rendre hommage à l'ingénieur du son pour
son travail tant le rendu donne l'impression de plusieurs instruments,
une multitude de prise de sons, une musique qu'on pourrait croire bardée
d'enluminures électroniques. Mais Colin Stetson est seul au monde
avec son saxo (trois pour être précis, alto, basse et ténor).
On me glisse dans l'oreillette qu'il utilise une technique dite de respiration
circulaire lui permettant de tenir de longues minutes sans interruption.
Qu'il scotche également un micro collé sur sa gorge pour
décrocher des feulements, complaintes étranges. Qu'il donne
un effet percussif en tapant sur les clés de ses saxophones. Que
sa maîtrise de l'instrument et sa haute technique pour souffler
dedans confèrent des textures sonores riches et variées.
Certainement. Mais on s'en tape à vrai dire.
Parce que la première fois que vous écoutez ce disque, vous
ne vous doutez de rien. Vous êtes juste happé par le flot
musical qui devient un son unique, hypnotique. Subjugué par la
puissance d'évocation qui se dégage de ce deuxième
album. Par l'impact physique des sonorités graves qui vous prennent
aux tripes. Frappé par les ambiances envoûtantes mais générant
de l'angoisse, par ce parfum de mystère qui flotte dans l'air,
tous ces sons qui sortent de nulle part, enjolivent l'atmosphère
tout en évoluant dans une enveloppe sombre et âpre. Les seuls
ajouts, outre un magnifique cor d'harmonie sur All The Days I've Missed
You, sont les voix de deux invitées. Laurie Anderson et Shara
Worden sur six des quatorze titres. Histoire d'apporter encore plus de
diversités et surtout d'atténuer les douleurs, les chants
aériens ou une simple et sobre narration se mariant admirablement
bien avec la gravité de l'univers de Colin Stetson. Un disque aussi
mélodique que bruitiste, aussi utopique que physique. Un disque
qui n'est pas du jazz. Un disque qui n'est rien de connu. On y plonge
sans retenue.
Réalisé en février dernier, New History Warfare
Vol.2 : Judges laisse place déjà à un nouvel
enregistrement de Colin Stetson. Un 10'' deux titres, Those Who Didn't
Run/The End of your Suffering, un magnifique rhinocéros
en surimpression, un vinyl bien lourd et un code de téléchargement
à l'intérieur comme pour l'album. Deux titres atteignant
les dix minutes chacun alors que les morceaux de Judges ne s'épanchaient
jamais au-delà des cinq minutes. Pour autant, Colin Stetson joue
les prolongations, développe un univers et une technique d'enregistrement
identique, comptant sur la longueur des compositions pour vous hypnotiser
encore plus. Comme un long drone de saxo, aux variations multiples, soutenu
par une complainte vocale lancinante. Mais la durée ne joue pas
forcément en sa faveur et les dix minutes de Those Who Didn't
Run ne sont pas exempt d'ennui alors que tout partait bien. Idem pour
The End of your Suffering. Le saxo part en boucle avec un effet
de percussion pour donner le rythme, on guette l'évolution, le
décollage progressif, la cassure ou la variation ultime qui ne
vient qu'en toute fin pour mettre un peu de piment. Réduit de cinq
minutes chacun, ces deux titres auraient été une nouvelle
fois parfaits.
SKX (30/11/2011)
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