Mine de rien, Picore sort son déjà quatrième album et il est grand temps de se pencher sur leur cas. En même temps, les quatre espagnols de Saragosse avaient beau avoir aligné des disques intéressants, ils n'avaient pas encore atteint ce niveau d'excellence. Alors si vous prenez le train en marche, Imaginate Que Aciero est le moment parfait. Et parfait est aussi le terme pour décrire la mécanique de haute précision de Picore. Une musique qui est de l'ordre de l'énigme, générant des sentiments contradictoires. Du noise-rock à émotions, aussi limpide que complexe, froid et chaleureux. Chaque instrument est délié et en même temps, la fusion est extraordinaire, la coordination exemplaire, ne faisant voir que du feu, où tout coule de source. Tout semble extrêmement travaillé, on les imagine des heures durant à mettre tout ça en place pour qu'au final, l'impression d'un rock limpide et profond prédomine. Des rythmes qui ne tournent pas rond et qui claquent en même temps, des rythmes sous-tension qui peuvent générer des pas de danse trapézoïdales, les imbrications d'une guitare et d'une basse, se glissent dans les méandres de compositions toutes en retenues, superposent les couches pour que la pression monte, répètent les mesures, tout en baignant continuellement dans une aura mélodique et faire briller des explosions éclatantes. Le chant, tour à tour neutre ou simplement narré, très articulé et dans la langue natale, participe également à ce sentiment d'envoûtement, un semblant de synthés peaufinent les jonctions, on se retrouve immerger, pris dans une forme aussi mouvante que tranchante. Une mécanique qu'ils n'ont eue de cesse de chercher depuis leurs débuts et vu la difficulté de la tâche, Picore ne trouve le dosage idéal qu'au bout de quatre disques. Libranos Del Mal, l'album précédent, était déjà une belle pièce mais là, c'est franchement devenu bluffant.

SKX (27/05/2011)