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Dure-Mère
Sangre - CD
Self-released 2010
Une affiche
de concert de Dure-Mère a récemment interpellé mes
pupilles avec la mention descriptive lapidaire : tango progressif. Franchement,
qui a envie de se farcir du tango progressif ?!
Pour le tango, on comprend l'allusion puisque Dure-Mère, trio de
Montpellier, utilise comme instrument principal le bandonéon, instrument
du tango par excellence. Mais Dure-Mère est au tango ce que André
Rieux est au classique. Une totale perversion de la mort. Il est bon de
choquer le bourgeois. Pour progressif, si on entend les boursouflures
à pattes d'eph des seventies, solo à n'en plus finir et
démonstrations pyrotechniques à tous les étages,
c'est fausse route. Par contre, progressif dans le sens compositions narratives
avec introduction, développement, rebondissement, flash-back, scénario
cabalistique et épilogue à surprise, vous touchez du doigt
mais ne faites qu'effleurer le nud de Sangre.
Cinq compositions pour plus d'une heure de musique, des morceaux dépassant
le quart d'heure, vous en allez avoir pour votre progressif. Mais une
histoire de cette durée là, vous ne pouvez pas tutoyer les
anges à chaque seconde. Des essoufflements, des pauses pour aller
chercher une bière dans le frigo, penser à la liste des
courses, vous aurez tout le temps de décrocher de l'histoire. C'est
de la dynamique d'album qui scie volontairement, inconsciemment la branche
sur laquelle le trio est haut perché.
Mais comme ce premier album n'est pas qu'un solo de bandonéon,
sinon l'histoire aurait vite tournée au hara-kiri, une belle batterie,
une guitare acoustique et quelques claviers sont intimement liés.
Sangre est donc également un album arrivant à vous embarquer
dans leur drôle de voyage, du coté de l'Argentine et son
Radikal Satan, un peu de Cheval de Frise et son abstraction attirante,
des accélération bien placées, surtout en fin d'album
(sur Marché aux bestiaux), quand la sonorité du bandonéon
commence à vous sortir par les trous de nez et qu'ils envoient
balader un bon coup de pied dans le décor. Le guitariste sait alors
tirailler sur les cordes, le batteur offrir des rythmes libres et trépidants
et faire envoyer valser le tango avec La Conspiration des femmes jolies,
montée d'adrénaline sans bandonéon et un bel esprit
d'anarchie.
Dure-Mère, drôle de nom, drôle de groupe qui fout douze
idées par morceau, de quoi faire un seul album avec chaque morceau
mais eux ont tout balancé sur le tapis, à toi de te débrouiller
pour faire le tri.
SKX (14/04/2011)
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