Kong
Snake Magnet - CD+DVD
Brew/White Drugs/Graphite 2009

On pourrait facilement attaquer ce groupe de Manchester par la face image. Par le DVD se logeant dans le confortable et épais digipack. Une ode au cinéma d'auteur. A faire passer Monty Python pour du Alain Resnais avec une touche des Sous-doués en vacances. Ca vous habille son groupe. Difficile de ne pas prendre Kong pour des cons après ça. Et les cons pour des Kong. Trois potaches continuellement déguisés. La tronche grossièrement déformée avec un masque transparent et un maquillage à la truelle comme le gus sur la pochette promenant son bourrin dans une fête exotique dans un pays où on sait encore s'amuser. Allez savoir où ces dégénérés de rosbifs ont encore été traînés leur sale flegme en vacances ! Des travellings en patin à roulettes à couper le souffle. Un huit clos avec leur mère digne de Cassavetes. Des séances backstage très fengshui et des dialogues de mongoloïdes centristes. A ce niveau là, ce n'est plus de l'absurde et de la dérision, c'est de l'art sans filet, de la bravoure donnée à des cochons.
Et pourtant, Kong n'est pas la moitié d'un. Face musique, c'est tout le contraire. Il y a bien cette voix présentant des déficiences mentales, suivant un cours fluctant de terminaisons nerveuses allant de l'incohérent à l'exalté, du mélodique intense au chœur à deux mais la musique, cette baffe ! Et comme on est aussi la moitié d'un et que l'autre est maso, on tend la seconde joue avec plaisir. Kong, un trio en rappelant un autre, Oxes. Aussi bien pour l'esprit ludique de grands enfants attardés que pour la baston rythmique qu'ils imposent. La batterie est à ce titre complètement affolante. Limpide, déterminée et ardente (comme Fanny). Et puis un autre trio, McLusky. Dans leur facilité à accrocher l'oreille avec des morceaux drus, un (gros) poil certes plus complexes et longs (cinq minutes de moyenne) mais dont l'évidence s'impose toujours. Des compos comme Leather penny, Blood of a dove, Wet Your Knives ou Sport, c'est de l'or en barre et c'est valable pour les dix titres. Sauf deux. Good Graphics, placé en plein milieu des ébats. Instrumental tarabiscoté à l'électronique qui aurait pu être pris pour une respiration mais qui fait essentiellement travailler l'index afin d'appuyer sur la touche zapping. Et Long, le dernier, dont les huit minutes et la durée ont judicieusement fourni le nom. C'est une nouvelle fois l'esprit retors de Kong qui se manifeste. Le même plan, la même note, bloqués pendant un long vol immobile, le degré de l'adrénaline grandissante n'étant pas suffisant pour rendre intéressante l'explosion finale, et tout compte fait, contenue. Tout le contraire de l'opinion, qui lui, ne sera pas contenu. Snake Magnet hypnotise par sa force et sa roublardise. Un très beau pavé dans la mare noise-rock.

SKX (21/01/2010)