Horseback
The Invisible Mountain - CD
Relapse 2010

Le metal pour intellos dépressifs et mélomanes trop sensibles a le vent en poupe, profitons-en ! Plus sérieusement, on se serait plutôt attendu à ce que ce soit un autre label que Relapse qui publie un tel disque. Explications : The Invisible Mountain est d'abord sorti sur Utech records - un label mega arty avec Jazkamer, Nadja, James Plotkin, Aluk Todolo, Ultralyd, Skull Defekts ou Locrian dans son catalogue, autant dire à peu près n'importe quoi du moment que ça ressemble à rien de connu - avant de bénéficier de ce qui est donc une réédition via Relapse. A noter que le label Aurora Borealis s'est lui occupé de la réédition en version vinyle. Donc si comme moi vous êtes passés à côté de The Invisible Mountain (chose assez mystérieuse car je suis régulièrement les publications en provenance de Utech), voici l'occasion d'une remise à niveau/séance de rattrapage. Cela en valait il la peine ?
Et bien oui. Le métal atmosphérique c'est mon dada et celui du bien nommé Horseback, un brin terreux et intrinsèquement contemplatif, se révèle largement au dessus du lot. Horseback c'est avant tout le projet d'un seul homme (Jenks Miller) qui joue de tous les instruments mais se fait aider de temps à autres par quelques potes, surtout à la batterie. Et ce Jenks Miller n'a que faire des rafistolages 70's et prog stratosphériques auxquels ont recours les musiciens/groupes de metal retro-shoegaze dès qu'il s'agit d'avoir l'air romantique mais intelligent. Pourtant il n'en faut souvent pas beaucoup pour basculer du divertissement soigné à la mascarade indigeste mais Horseback sait se tenir, pas très fougueux certes, mais donnant à son blues monolithique et minéral un aspect carrément narcoleptique et enfumé. Le chant emprunte lui clairement au black metal, mais un black metal enroué et plus shamanique que haineux.
Les quatre titres de The Invisible Mountain se suivent et évoluent selon un courant imperceptiblement descendant : alors que l'académisme quasi obligatoire du genre est aux montées en puissance, aux explosions finales et au magma extatiquement fusionnel, Horseback au contraire s'enterre au fil de ses compositions, quitte les versants desséchés d'un volcan à peine éteint pour aller se rouler dans l'herbe toute fraîche de la prairie et finir sa course les quatre fers dans l'eau glacée d'une source rocheuse. Les guitares mollissent, disparaissent, le chant également et c'est un synthétiseur tout aussi répétitif qui conclut sur un Hatecloud Dissolving Into Nothing d'un bon quart d'heure. Après, il ne reste qu'une seule chose à faire : une bonne sieste et de beaux rêves qui assurément ne pourront qu'être réconfortants.
S'il y a quelques critiques et limites à émettre au sujet de The Invisible Mountain elles concernent surtout le mysticisme un peu convenu et plat qui se dégage du disque. On peut également regretter le côté édulcoré et cosy d'une musique qui n'a surtout rien de dérangeant ou de tellurique, si on écoute The Invisible Mountain à un trop faible volume on risque de trouver le disque absolument parfait pour assurer la bande son d'un remake de Brokeback Mountain par John Hillcoat. Seule une écoute à un volume sonore indécent (ou alors au casque) permettra de se prendre une bonne torgnole (méta)physique dans la tronche. Tu n'as donc qu'à monter le son, camarade.

Haz (23/10/2010)