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Heliogabale
Blood
- CD
Les Disques du Hangar 221 2010
Heliogabale,
l'énième retour. Quinze ans d'activisme, cinq albums et
un EP, une présence discrète dans les salles de concerts.
Heliogabale, un des derniers mohicans de la scène noise-rock française
du début des années 90 avec les Kill The Thrill. Ils font
parti du paysage sans vraiment y être. On n'est même plus
surpris de les réentendre après six ans de silence et un
Diving
Rooms excellent.
Heliogabale a toujours eu l'habitude de souffler le chaud et le froid.
De s'offrir une image contrastée. Ce sont les anti-Marvin. Loin
d'être potes avec tout le monde. D'être d'une sociabilité
à toute épreuve. De sillonner les routes à la recherche
du moindre concert. Un parcours erratique, une situation où ils
ne semblent plus rien attendre de spécial. Se faire plaisir, libre
de faire ce qui leur passe par la tête.
Exit le noise-rock de Diving Rooms qui renvoyait à leur
début rimant avec sombre et dépravé. Exit les atermoiements
de Mobil Home. Blood raconte une nouvelle histoire. Et elle
a été tiédasse au début. Le sang ne coulait
pas à flot. Heliogabale a décidé de se la jouer beaucoup
plus tranquille. Confier l'enregistrement et le mixage à Antoine
Gaillet et Patrick Müller, qui se sont occupés de M83 et BB
Brunes entre autres, est un premier signe. Surtout quand dans son histoire,
on a plus eu l'habitude de Ian Burgess et Steve Albini. Voix en avant,
ça toujours été un peu ça chez Heliogabale
mais là, c'est encore plus flagrant. Guitare en retrait. Bien dommage
car elle en a des choses à dire. C'est même elle qui fait
tout le boulot. Son léché, ajout d'un saxophone (sur Ô
my friends et sirupeux sur Zigzag) pour un éclat vieillot
s'intégrant difficilement. Heliogabale aurait décidé
de se remettre en cause qu'ils n'auraient pas fait autrement.
Mais une fois cette barrière passée, force est de reconnaître
que la qualité des compositions est là. Le nerf de la guerre.
Un Heliogabale à nu, qui ne se cache plus derrière les dissonances
et la véhémence. Le sombre s'est transformé en une
mélancolie douce-amère. Le poids de l'âge, le fil
des ans. La guitare de Philippe Thiphaine déploie des trésors
de finesse mélodique, tire l'album vers le haut, là où
la section rythmique se fait plus discrète que d'habitude. Mais
qu'on ne s'y trompe pas. La tension est présente, larvée
sous ces faux-airs de pop-rock sans danger et les morceaux finissent par
s'imposer d'eux-mêmes. Foolish If, l'énorme Knocked
out où on jurerait entendre les gémissement d'un Eugene
Robinson (Oxbow), Juicy Fruit et la ligne de basse inspirée
de Vivian Morisson (qui a quitté le groupe depuis), Q for Qing,
malgré la voix rocailleuse de Sasha Andrès bien trop sur
le devant, le subtil Rewind terminant l'album d'un groupe qui ne
rembobine pas le fil de son histoire, ne regarde pas derrière lui.
Heliogabale tisse sa toile patiemment et malgré une piqûre
initiale inconfortable et des défaillances, Blood finit
par couler dans vos veines, évident.
SKX (03/10/2010)
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