Grids
White Walls - LP
Inkblot 2010
Kansas - LP
Made In Kansas 2010

L'huile lubrifiante. La caisse à outils. Huitième clou en partant de la droite. Tu enlèves le cintre et ta dépouille de trépassé et tu laisses aller, c'est une valse. Le coup a été rude. On ne sort pas d'un single, la bave aux lèvres, pour tomber dans un traquenard. On est tombé sur l'équipe de relève. Un changement de bassiste n'explique pas tout. White Walls. Le problème n'est pas qu'il soit plus bruyant mais que le bruit cache tout. La crasse de l'atelier sur les rouages, les boulons crantés coincent. Le mur blanc n'est qu'une vue de l'esprit. On l'avait notre groupe noise ultime, d'accord mais c'est un patin dans l'abstrait. Le mot fuzz est trop faible pour les deux guitares, noie le propos, fini par arrondir les angles qu'on devine pourtant saillants, avec le pouls d'une batterie qui tente la survie dans le lointain, le chant sans espoir malgré les cris. Six titres trop linéaires dans leur débauche. Aucun clou ne dépasse malgré un Allergies qui sort du lot, rappelle les grandes heures des texans de Cherubs, encore plus crade et obtus (comme si c'était dieu possible). C'est pas qu'il soit mauvais ce White Walls, on sent bien que ça bouillonne là-dedans, que leur folie est à deux doigts d'être contagieuse, que les guitares vous tirent des larmes, des épines des oreilles mais le carnage incessant, pourquoi ? Un poil de déception subsiste…






Alors je ne sais pas si c'est un total hasard, une boulimie d'écriture ou si le groupe a senti que quelquechose n'allait pas dans ce White Walls qu'ils ne sont pas loin d'avoir pris de plein fouet mais à peine trois mois plus tard, Grids sort déjà un nouvel album. On remet le compteur à zéro. On respire bien à fond. Bruissement de régal. Kyle Spence, batteur de Harvey Milk et feu-Fiddlehead, une fois rentré de tournée européenne avec son J. Mascis & The Fog, déclare sa flamme à Grids, enregistre ces nouveaux sauvages en un jour un seul, le mixe avec le groupe le jour suivant, en oubliant de dormir entre les deux, et remet Grids sur les bons rails. Ceux du single en plus abrasif, ceux d'un noise-rock affolant, d'u noise-rock qui lève le nez du guidon. Kyle Spence a également remis les guitares à leur place. Et la basse à son rang, comme dans tous bons groupes noise-rock. Ca fait toujours beaucoup de bruit mais on entend le reste vivre, exploser, respirer dans ces moindres déflagrations. La sueur fait partie du bonhomme. Entre les fesses aussi. Kansas n'épargne rien. Quand ça fait mal, quand ça gémit, quand ça hurle à la lune, tout est bon dans la souillure. Grids retrouve son mordant, sa force de persuasion, son fil historique avec Glazed Baby, fait son show à la Hawks, son Young Widows pouilleux à l'anarchie latente/débordante/passionnée. Tout est une question de contrôle et ce qui est bien avec Grids, c'est qu'on sent qu'ils ne calculent rien, quitte à faire des White Walls, quitte à faire un Kansas monstrueux dans la foulée. Faut que ça crépite, faut que ça vive et Kansas est un brûlot noise-rock d'une nature excessivement jouissive.
À l'heure où ces lignes s'écrivent, le disque n'est pas encore sorti mais vous pouvez déjà le télécharger sur leur blog. Ainsi que le White Walls. Ou le single sur Lunchbox. Sans oublier des cassettes avec des inédits, des ré-enregistrements. Et des live aussi. Et même ce Kansas en version demo, une seule prise live, un truc qu'ils ne feront plus jamais. En attendant, vous pensez bien que la copie du Kansas est déjà réservée ! Mais on ne pouvait décemment pas attendre de vous parler d'un tel disque.
Depuis, Rick, le second guitariste est parti former son propre groupe, Young And In The Way all the time, que l'histoire de Grids s'écrit désormais à trois et qu'on est pas au bout de nos peines avec ce groupe.

SKX (20/10/2010)