V13
Overlook Hotel - CD
Swarm Of Nails 2009

Tir à vue sur tout ce qui bouge. Ou frappe qu'un coup. Ce qu'il y a de bien avec V13, c'est de voir qu'ils ne s'accrochent pas à un genre particulier. Leur cible est mouvante. Ca reste du rock à guitares. Avec des éclats, de l'intensité, des creux et de bonnes saillies cachant tant bien que mal des émotions à fleur de peau. Du rock quoi (et du rock de Cannes en plus). Et pourtant, ne se rattache à rien de concret. J'ai beau me concentrer, viser, non, je vois rien. Subir les évènements. Se raccrocher à du concret, à un Serge Morattel planqué dans ces montagnes suisses pour de la came qui n'est pas la sienne habituellement. A Chiara Locardi (L'Enfance Rouge), invitée sur Mais ils ne renforcent pas le camp ennemi qui comptait déjà des millions d'imbéciles, et où l'on est objectivement condamné à être un imbécile, titre ridiculeusement con autant qu'il est bon, le morceau, long et généreux. La présence de la chanteuse italienne, à faire dresser la couenne, la voix chaude, le grain au fond de la gorge pour faire vibrer la ballade rocailleuse.
Avant d'en arriver là, cinq décharges, tout le contraire. On rembobine l'histoire. Puzzle, premier album, autre temps, autre mœurs, autres membres car si c'était pour se taper ce genre de marade, autant partir à la chasse, la vraie. Retour avec des armes autrement affûtées, V13 change son fusil d'épaule. Retour à la nature, plus près des racines rock. Pourquoi se compliquer la tâche alors que faire simple est déjà si compliqué. Au final, V13 s'éparpille toujours autant, façon puzzle, mais bizarrement est cohérent. Dynamiter sans se disperser. Des restes du passé mais débarrassé de sa complexité sur le chaud bouillant Rénégat, au Noir Désir / Tu as choisi d'entrer / partir à la pêche des sombres héros de l'amer avec du gros hameçon et ramené Gouache, tortueux et sombre, lui aussi. Des relents d'un rock filière classique repassé au karcher à plusieurs reprises, l'ancien et le moderne, aussi noise que rock, tendu à défaut d'être bandant. Et puis donc ce morceau au titre à rallonge, on recolle l'histoire, puzzle toujours. V13 dépose les armes, met une fleur au bout de son canon, sort le violon, le piano, le vibraphone et autres instruments bucoliques comme la trompette pour regrouper la meute. Pygmalion, c'est plus Tiersen et Comelade que cheveux gras sur riffs hirsutes. Le chant en français commence à se faire comprendre quand le volume globale descend, ajoutant une nouvelle corde bien sentie à un arc qui aurait pu faire peur, le rock et le français ayant souvent fait mauvais ménage. Overlook Hotel, le morceau, se la rejoue Noir Désir boosté par une bonne paire de claque pour une deuxième partie d'album qui, sans être calme, ouvre le champ d'actions de V13. Et au passage, une curieuse manière de découper un album. Dichotomie prononcée. Je te fous la pâtée pour commencer et je pense tes plaies après. Le rock à Cannes ne décroche pas la palme mais on apprécie sa remise en cause, sa liberté, son ouverture d'esprit, d'aller là où le vent le pousse car c'est bien connu, le rock est comme l'argent, il n'a pas d'odeur, il va où bon lui semble, surtout quand il aborde cote à cote les logos Noise Rock Culture Magazine, la région PACA et le Ministère de la Culture pour s'exprimer pleinement…

SKX (29/11/2009)