Radian
Chimeric - CD
Thrill Jockey 2009

Il en a mis du temps à sortir ce cinquième album de Radian et il s'en est passé des choses depuis le brillant et excellent Juxtaposition (2004). Entre-temps, les trois membres du groupe se sont essayés au projet solo - Stefan Nemeth et son album Film pas très concluant - ou se sont adonnés à l'improvisation et au pimpo-bimbo, surtout Martin Brandlmayr qui a joué avec Martin Siewert et Werner Dafeldecker ou a monté l'excellent projet Trapist avec ce même Werner Dafeldecker et Joe Williamson de Kletka Red. Mais toujours la musique des trois musiciens de Radian est restée guidée par la manipulation en temps réel des sons et la recherche de fractures rythmiques. Ce n'est donc pas pour rien si le trio a souvent été comparé à This Heat : même niveau d'exigence, même désir de recherche et même pouvoir de composition. Une référence que les autrichiens ont toujours su manipuler avec circonspection et réussite.
Il y avait un côté ritournelle dans la musique de Radian avec des compositions instrumentales aux mélodies presque pop rappelant que le post rock est une musique qui n'a jamais existé. Sur Chimeric, l'évidence mélodique est quelque peu laissée de côté, les titres se sont allongés et le travail sur les textures sonores évite tout tracé trop évident. Ainsi Radian en voulant se renouveler un peu s'est en même temps quelque peu radicalisé tout en proposant toujours quelques atmosphères harmoniques prenantes (City Lights ou Git Cut Derivat) et excellant définitivement dans l'insistance rythmique (le presque bruyant Git Cut Noise en ouverture et le très typique Kintakt en guise d'apothéose). Mais surtout Chimeric est un album bien plus sombre et encore plus froid que ces prédécesseurs, instaurant climat inquiétant et ambiances urbaines - oh le joli cliché de chroniqueur - tout en continuant d'exercer un pouvoir de fascination pour une musique d'apparence décharnée aux subtiles couleurs électroniques tendant vers le fracas digital. Un album dont l'attrait ne fait que grandir au fil des écoutes et de sa découverte.

Haz (12/12/2009)