Enablers
Now You Can Answer My Prayers - 10''
Lancashire And Sommerset 2009

Ce qui est bien avec le label Lancashire and Sommerset, c'est que vous n'êtes jamais déçu par l'emballage. Rien que le nom du label en impose. En guise de joyaux de la couronne, on a une pochette cartonnée dans une couleur qui donne envie de boire un breuvage que les Anglais adorent (surtout chez nous) avec un lettrage doré en surimpression du plus bel effet. Par contre, ce que je n'ai jamais compris, ce sont tous ces labels qui pressent des disques avec la musique sur une seule face et de l'autre coté, un dessin, ou un gribouillage qui y ressemble, gravé à même le vinyl. Effet pictural médiocre. Tu prends, tu retournes et tu oublies à jamais. Intérêt néant.
J'étais pas loin de penser la même chose du contenu. Mais comme chaque nouveau disque d'Enablers a tendance à provoquer ce léger malaise avant de finalement succomber, le bras du tourne disque a plusieurs fois refait le voyage du bord vers le centre, rotation continue pour un résultat qui pour une fois confirme le premier sentiment : ces deux titres d'Enablers ne me secouent pas plus que ça. Même entre les lignes. Car avec Enablers, il faut souvent écouter autrement, se laisser guider par un mirage, se laisser envelopper par une impression fugace pour pleinement apprécier et sentir toute la charge émotionnelle intérieure. Cette impression mitigée s'explique sans doute par le fait qu'Enablers ait fait ce disque en une nuit, saisissant à reculons tout d'abord (et si j'ai bien compris les explications de Peter Simonelli sur l'insert du disque) l'opportunité faite par un certain Johannes Buffet d'enregistrer dans un miteux studio d'Hanovre et de passer la nuit à dormir parmi les cafards avant que le groupe ne comprenne que le studio en question, c'est du haut-vol, du standing pour groupes fortunés avec espaces princiers et des micro Neumann. Le genre de détail qui doit coûter à lui tout seul plus cher que tout leur matos réunit. Une nuit, c'est long. A écouter le résultat, on peut dire aussi que c'est très court. Pas suffisamment de temps pour trouver les bonnes idées, pas assez d'inspiration au plus profond de la nuit, quand bien même Joe Goldring avait déjà travaillé la compo (On Returning) et que l'autre (Hy) est une reprise de Touched By A Janitor, l'autre projet d'Enablers sans Simonelli. Hy s'en tire le mieux, le duel entre les arpèges en boucle et le riff consistant de l'autre guitare apportant un peu de relief à un titre tournant en rond, malgré les bruits parasites que le batteur essaye d'insuffler sur la fin. Pour On Returning, c'est beaucoup plus vaporeux. Ou liquoreux. Il ne faut jamais mésestimer les pouvoirs de l'alcool, surtout quand il s'agit de tenir en plein milieu de la nuit et qu'on s'appelle Enablers. Il faut toute la puissance évocatrice de la narration de Simonelli pour nous tenir (plus ou moins) en éveil.
En tout cas, entre un label dégageant un sentiment suranné et un groupe impressionniste, les deux se sont trouvés. Sans doute faut-il prendre ce disque comme un instantané, coucher sur bande un souvenir de tournée, le faire partager en sachant que les principaux bénéficiaires sont les auteurs eux-mêmes et que nous sommes que de pauvres spectateurs ne pouvant pas ressentir grand-chose. Acte masturbatoire isolé. If you got this we well do business.

SKX (12/12/2009)