Skullflower
IIIrd Gatekeeper - CD
Crucial Blast 2007

Oh voilà une réédition qu'elle est belle ! Il faut dire que pour cette ressortie du IIIrd Gatekeeper de Skullflower, Crucial Blast, label bien connu des amateurs de heavy intello, a bien fait les choses : joli pochette CD cartonnée avec toutes les illustrations d'origine, un livret contenant un texte élogieux sur le groupe que je n'ai pas pris le temps de lire, trop compliqué, et par dessus tout l'album remasterisé, sans bonus ajoutés (parce que neuf fois sur dix les bonus ça bousille un album, c'est quand même bien mieux de les mettre sur un éventuel deuxième disque comme ça on n'est pas obligé de les écouter). Et c'est d'une vraie remasterisation dont il s'agit, pas d'une montée générale et uniforme de tous les potards aboutissant inévitablement à une saturation complète du son sur toutes les fréquences : la comparaison avec la version originale du disque est incroyable -plus de profondeur, plus de contours (sur la basse notamment) et une redécouverte d'un disque qui nous est présenté comme fondateur. Voyons voir ça.
A l'époque de sa première parution en 1992 sur HeadDirt recording -petite maison montée par un Justin Broadrick super fan et épaulée par PDCD, Pure Dope Can't Damage, le genre de label qui battait le même pavé que le Pathological records de Kevin Martin- IIIrd Gatekeeper n'avait rien de fondamentalement différent ni de fondamentalement excessif par rapport aux autres groupes anglais contemporains et drogués, Godflesh, God ou même Terminal Cheesecake. Toutefois, avec plus de recul, la mixture que proposait le groupe de Matthew Bower (unique membre d'origine) possédait un caractère indéniablement psychédélique que les autres n'avaient pas. En exagérant un peu, ce qui n'est pas le genre de la maison, on peut même affirmer que Skullflower ce n'était rien d'autre que du Godflesh instrumental avec de la fuzz et de la wah-wah ou, si on préfère, du Black Sabbath en version indus qui aurait troqué Ozzy Osbourne contre un vrai mur d'amplis.
IIIrd Gatekeeper est l'un des disques les plus accessibles de Skullflower : on peut croire en l'écoutant que tout ce charabia de notes jouées à la guitare forme bien une mélodie, on peut proclamer que cette grosse caisse tellurique saccadée par des coups de caisse claire est bien un rythme, on peut prétendre que la basse n'apporte rien d'autre qu'un groove malsain. Tout cela est vrai, d'autant plus que Matthew Bower, comme pas mal de visionnaires, n'aura pas évité par la suite de se fourvoyer. Reste que IIIrd Gatekeeper est assez monotone, les titres se ressemblent, beaucoup ont cette tendance à débuter sur le même larsen, le groupe a du mal à proposer plus de deux types d'ambiances différentes. Typiquement le genre de disque remis au goût du jour par un effet très mode et dont l'impact a peut être été grandissant par la suite mais qui ne mérite pas grand-chose de plus qu'un intérêt historique et archéologique. Personnellement, je préfère très nettement l'album Infinityland (sur le même label, référence HD 04 et avec Philip Best de Whitehouse dans le line-up) parce que beaucoup plus varié et pénétrant. A quand une réédition ?

Haz (19/05/2008)