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L'Ocelle
Mare Du fin fond de sa cabane dans sa forêt humide, l'ex-Cheval de Frise Thomas Bonvalet nous envoie un signe de vie. Pochette à la sobriété maladive. Sept titres sans aucuns noms, même pas symbolisés par un chiffre ou un hiéroglyphe quelconque. L'économie de mots. Pas de geste inutile. La communication selon saint Ours. Un micro label naissant parisien au nom adéquat se charge de sortir la bête. L'hiver a été rude. Même si tout ça a été enregistré à l'automne dernier. Alors que son premier album sort sur le marché américain via Sickroom records, L'Ocelle Mare continue d'entre-ouvrir les portes de son monde d'autiste. Après être resté sur notre faim avec un premier jet âpre et abscons alors que les concerts démontraient une version plus intense et directe, il revient sans chercher à nous amadouer mais fait preuve d'un peu plus de mordant, de consistance. Accroches toi aux branches. Fini les espagnolades et les claquettes. Les quatre premiers morceaux, indissociables, font la paire belle au jeu tout en touché et croisements de phalanges d'un Bonvalet qui sait avant tout écouter son âme avant de penser technique, seulement rythmés par un métronome, quelques tapements de pied, un souffle d'accordéon (ou un truc qui y ressemble) et une subtile vibration. J'ai parlé trop vite. L'espagnolade reprend sur la troisième phase avant que ce mélange d'acoustique erratique et de sifflement comme un essaim d'abeilles dessinent des courbes brisées et des volutes carrées. Le cinquième morceau nous plonge la tête au fond de la mare. Le grouillement d'un mille-pattes cannibales chaussé avec des fers à chevaux et une stridence proche de l'ultrason. Thomas Bonvalet ne cache pas son attirance pour tout ce qui grouille, rampe, gratte. Il est en passe de réussir à faire le premier disque animal. Les deux derniers morceaux le voient reprendre ses pérégrinations tour à tour bucoliques et quasi-industrielles. Cet album ne figurera toujours pas en tête de gondole dans les grandes surfaces de la culture. Porte d'octobre en laissera encore beaucoup à son seuil. Mais ces histoires d'ambiances de campagne vierge et friches urbaines sont suffisamment convaincantes pour espérer que L'Ocelle Mare sorte encore régulièrement de son trou à rat. SKX (19/03/2008)
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