Dianogah
Qhnnnl - CD
Southern 2008

Je croyais ce groupe définitivement rangé des bagnoles. Et pour cause, six ans de silence. Brusque réapparition avec un quatrième album au nom qui compte triple au scrabble. Une formation inchangée en 13 années d'existence avec un fameux trois mats composé d'un batteur et deux bassistes. Dont un qui chante. Ca peut paraître anecdotique mais pour un groupe qui passe pour être instrumental, c'est une belle performance que de chanter sur une majorité de morceaux. Mais pas une nouveauté. Le passé les a déjà montré friand de lignes de chant. Eparses, certes mais présentes. Dianogah a débuté en 1995 et fait parti de ces enfants de Slint. La deuxième génération tellement amoureuse du concept qu'ils ont essayé tant bien que mal de le reproduire. Mais Slint ayant tout dit, l'histoire a vite été court-circuitée et Dianogah s'est inscrit dans la longue liste des groupes inspirés par le Maître en essayant tant bien que mal de se faire entendre dans la masse laborieuse. Et si le Spiderland de Slint avait fait plus de mal que de bien ? Parce que depuis, des groupes semi-instrumentaux vite classés dans l'étiquette bâtarde post-rock, on en a soupé et à l'arrivée, très peu d'élus peuvent bomber le torse. Et Dianogah, malgré un premier album As Seen From Above sur Ohio Gold records en 1997 plus qu'honorable, ne peut prétendre à jouer les cadors. La suite a été très poussive et les voir disparaître de la circulation n'était qu'une fin logique et annoncée.
On remet le courant. Dès les premières notes, je me rappelle pourquoi aucun albums de Dianogah ne traînent sur les étagères. Oui, on peut rapidement se faire chier avec un disque de Dianogah. Le trio incarne l'idée affreuse du post-rock, la face mou du caisson, l'instrumental sans vie de bons petits étudiants sans révolte, trop appliqués à réciter sagement leurs gammes et faire partager leur spleen. Malgré ce portrait au vitriol, ce nouvel album de Dianogah n'est pas totalement rédhibitoire. On retrouve les tics du passé, ces parties instrumentales qui se mordent la queue et qui n'ont rien à dire de plus qu'il y a six ans. Ce coté gentillet, limite niais, qui agace. Mais Dianogah a compris que le créneau est depuis surchargé, qu'une pelletée de nouveaux groupes le fait aussi bien qu'eux, voir mieux. Leur salut passera donc par une palette d'émotions plus variée. Ils n'ont pas hésité à inviter à tour de bras. Stephanie Morris pour du chant sur trois titres (les plus pénibles en fait, la sauce ne prend pas), le violon de Andrew Bird, un brin de guitare et de claviers et encore du chant de la part de deux autres invités dont la connaissance du nom n'est pas d'une grande utilité. Une remise en question des vieux réflexes. Le chant prend ainsi plus d'ampleur, les ambiances se diversifient. Se durcissent même sur un surprenant Qhnnnl - le morceau - digne des groupes noise-rock virulents qui ont fait la réputation de leur ville Chicago (avec comme un cuivre dans le fond mais vu que personne n'est crédité de cet instrument, ça doit être un mirage à l'instar de ce morceau). Dégaine de petits durs qui revient pour Snowpants et un son bien distordu, le nerveux Puma ou le très court mais bon Song You Hate. Quand Dianogah se fait violence, il peut devenir un putain de bon groupe, quittant ses oripeaux post-rock et surtout le post pour être tout simplement rock. Et il faut bien l'avouer, même si tout le disque n'est pas habité de cette fièvre salvatrice, il n'en reste pas moins traversé d'un second souffle. Un renouveau qui donne de la consistance au propos d'un Dianogah dont on n'attendait plus rien, déjouant les clichés tout en restant de fiers représentants d'une certaine tradition musicale.

SKX (17/09/2008)