Charlottefield
What Friends Are For - CD
Fat Cat 2007

J'ai bien fait de laisser mijoter cet album à feu doux. Deux, trois écoutes auraient suffit à une chronique lapidaire. Et puis un beau jour, alors que la musique défilait mécaniquement comme un escalator dans mon lecteur numérique made in China à deux balles qu'un Albanais ne voudrait même pas en cadeau, un morceau m'a subitement interpellé sur le mode : merde c'est quoi ça, c'est bien ?! C'était Beatings, le titre d'ouverture du nouvel album des Anglais de Charlottefield. Et la suite était à l'avenant. C'était comme on dit un déclic. La faute à un premier album How Long Are You Staying parsemé de tubes et de titres lumineux comme Clipper, A>>B car sur ce What friends are for, il n'y a rien d'immédiat. Déjà que leur style musical est un poil bâtard, un peu tout et rien de précis à la fois, là, c'est devenu encore pire. Les compositions sont toutes intricate comme disent les rosbifs, c'est à dire fouillées, compliquées, peinant à décoller et finissant par sonner quelconque. Genre de rock anguleux et émotionnel qui finit par se prendre les portes à force d'en ouvrir trop. Enfin, ça, c'est ce que vous vous dites au début. Car une fois le déclic enclenché, on s'immerge plus facilement dans les dédales de morceaux faussement complexes, on navigue volontiers entre un indie-rock corsé à la Shipping News et quelquechose de plus frondeur et sombre, la rage au bout des lèvres d'un chanteur que je préfère nettement quand il éructe plutôt qu'en mode aérien. Mais le patron chez Charlottefield, ça reste le batteur. Ca se voyait déjà lors de leur concert à Nantes avec Part Chimp en octobre 2006. Le gars qui en voulait, motivait ses camarades de jeu et essayait de les sortir de la torpeur, il faut bien le dire, c'était ce barbu qui aurait facilement pu passer pour leur père. Sur disque, son abattage donne une dynamique incroyable à une musique qui semble capable de flancher à de nombreux moments. Parce que déclic ne signifie pas béatitude, cet album, même si il est devenu agréable, manque d'ampleur et de titres qui mettent tout le monde d'accord.
Mais tout ça, c'est de l'histoire ancienne. Le groupe a splitté très récemment. Ils avaient déjà laissé pas mal de monde en plan en plein milieu de leur tournée européenne en mars dernier, sur les bords d'une route espagnole à cause d'un van récalcitrant. De là à dire que cette panne était diplomatique et que le carbu a le dos large, il y a un pas que je ne franchirais pas parce que j'en sais fichtrement rien et que le groupe annonce avoir mis fin à l'aventure dans la plus grande et sincère camaraderie, à Brighton, suite àun concert avec Old Time Relijun, le 22 avril 2008, soit huit ans et deux jours après leur tout premier concert. Merci bonsoir.
(Un nouvel EP est tout de même annoncé, ainsi que d'autres trucs, peut-être, un jour...).

SKX (28/05/2008)