Fœtus
Love - CD
Birdman 2005

Il faut s'appeler Jim Thirwell, alias Fœtus, pour faire un album centré autour de la thématique du… clavecin ! Aussi attractif qu'une chorale de jeunes enfants bénis à l'eau de cureton, cet instrument d'un autre âge n'est pas l'apanage du rock et il me faut bien des absences pour avaler ce son si particulier où chemise à jabot et perruque en chute royale à petits pas sur les pointes défilent à ma vue à chaque note. Mais Fœtus est passé maître dans l'art de marier les ambiances et instruments bigarrés depuis belles lurettes, associer un univers urbain chargé en particules nocives et des sonorités de grand-mère. En même temps, quand je dis clavecin, c'est loin d'être le centre du monde de Fœtus et autour de son nombril, moult tracasseries auditives interfèrent, prennent le dessus. Un violon qui virevolte comme une mouche, une harpe qui s'épanche en douce. Ah il est fort, très fort, manque plus qu'une flûte de pan et c'est la totale ! Fœtus possède toujours ce sens de la symphonie halluciné, le baroque au service du rock, envoyez les trompettes, sonnez piano, faites valser sur Times marches on, rythmes de charge en avant. Les années passent et il ne perd pas la main. Mais c'est l'album de l'amour et Love recèle aussi des trésors de blues des villes, des ballades où une belle se réveille à la voix, des ballades en apesanteur où l'orchestration met la pédale douce comme le magnifique Pareidolia. Après cinq années de silence, Fœtus revient comme à l'accoutumée. Sa recette est connue mais il la distille toujours avec plus ou moins de bonheur. Même si ce pionner de la musique industrielle joue désormais plus dans la cour rock, qu'il ravit plus les fans de Nine Inch Nails en mal de crédibilité que les puristes de la musique pure et dure, Fœtus, au-delà de ses excès, continue d'œuvrer dans le bon sens, juste heureux d'être toujours là après quinze ans de service et quarante douze mille disques. On a connu des vieux croûtons plus à plaindre.

SKX (14/05/2005)